Le Pulse, haut-lieu de rencontre, de rassemblement et de fête de la communauté LGBT, à Orlando a été ensanglanté par une tuerie sauvage qui a fait quarante neuf morts. Si nous ne voulons pas être submergés par cette tragédie comparable à celle qui nous a frappés en janvier puis en novembre, alors il nous incombe de ne pas nous tromper ni sur le mal ni sur les mots pour le qualifier.
Le terrorisme n’est pas aveugle. En France, à Magnanville, à Paris ou à Toulouse, il frappe à dessein des militaires, des policiers, des juifs, des dessinateurs, pour finalement faucher une partie de la jeunesse parisienne le 13 novembre dernier.
À Orlando, c’est une chasse à l’homme qui a eu lieu à ceci près que seul le chasseur était armé et que ses victimes n’étaient là que pour se retrouver dans un moment de fête. C’est la liberté qui a été visée. Et la liberté sexuelle dont jouissaient ces 49 morts était intolérable à leur bourreau. C’est pour cela que le premier hommage que nous devons rendre aux victimes est celui de la vérité. Et la vérité est qu’il ne s’agit ni d’un crime sourd, ni d’un assassinat aveugle mais de l’exécution de masse de gays ou de personnes supposées l’être.
Le terrorisme n’est ni sporadique ni spontané, mais planifié et organisé. Et le terrorisme islamique doit être nommé comme tel. Voilà que s’agissant de Omar Matteen ressurgit la funeste théorie du loup solitaire un peu plus de cinq ans après qu’elle se soit écroulée s’agissant de Mohammed Merah. Arrêtons de nous cacher derrière ce paravent commode : un tireur agissant seul a toujours été endoctriné. Cet endoctrinement est le fait de réseaux puissants et de méthodes sophistiquées. Il est soutenu, financé et encouragé par des structures qui se sont dotées de l’apparence d’un Etat qui s’étend encore à ce jour sur une partie de l’Irak et de la Syrie: l’État islamique.
Parce que cette fois-ci les Etats-Unis ont été visés, que des homosexuels sont tombés, la plus grave erreur, au-delà de l’indécence, serait de croire que, parce que nous sommes Français et hétérosexuels, nous ne sommes pas concernés par la tuerie d’Orlando. C’est tout le contraire.
À Toulouse il y a cinq ans, Mohammed Merah pénétrait dans une école juive pour y tuer des enfants. Avoir mis tant de temps à parler de terrorisme, n’avoir pas su parler d’antisémitisme et n’en avoir tiré aucune conséquence en termes d’action publique a permis à Paris d’être visé par les attentats à Charlie Hebdo et à l’Hyper Cacher.
Le terrorisme a ses cibles spécifiques mais n’a pas de frontières. Le reconnaître, c’est comprendre que nous pouvons être fauchés à tout moment. C’est se sentir plus proche d’un Israélien qui tombe sous les balles que du fanatique palestinien qui lui a tiré dessus. Ce n’est pas comme le PIR - qui décidément porte bien son nom - qui se réjouit qu’un attentat ait été commis en Israël. Si le massacre d’Orlando nous permet d’exprimer à nos frères en humanité nos sentiments de fraternité et de solidarité, alors nous en serons grandis et plus forts.
Notre premier ennemi est l’indifférence. Le 2 juillet prochain aura lieu la Gay Pride à Paris. Nous ne sommes pas forcément Parisiens. Nous ne sommes pas forcément gays. Nous n’allons pas forcément à la Gay Pride chaque année. Mais cette année nous y serons. Simplement pour ne pas laisser les homosexuels seuls après ce massacre. Pour leur montrer qu’ils font partie de nos vies et de nos sociétés et que ce qui compte n’est pas tant la question de leur sexualité que notre liberté de pouvoir la vivre pleinement et sereinement, sans craindre ni le regard ni les balles. Quand on a tué à Charlie, nous étions journalistes ; quand on a assassiné des policiers, nous étions flics ; quand on a été tué par antisémitisme, nous étions juifs. Le 2 juillet prochain nous serons homos au milieu d’autres homos. Parce qu’ils s’aiment et que nous les aimons. Parce que nous sommes libres et que nous voulons continuer à le rester.