Alors que le terme de ce quinquennat approche, nous devons être lucides sur notre bilan. Durant les quatre dernières années, notre pays a été confronté à des défis d'une ampleur inédite depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Défi économique, avec un ralentissement de la croissance mondiale, un risque de dislocation de la zone euro, des révolutions technologiques sans précédent redistribuant les cartes dans de très nombreux secteurs. Défi social, avec un chômage de masse à des niveaux sans précédent (plus de 3,5 millions de personnes), avec une fracture de plus en plus profonde entre des insiders bien intégrés dans la société et des outsiders se sentant exclus du pacte républicain. Défi du terrorisme enfin, avec la multiplication des attentats et cette menace qui pèse désormais sur chacun des actes de notre vie quotidienne : boire un verre en terrasse, se rendre à un concert, assister à une cérémonie religieuse. Face à l'ampleur des défis, les Français sont inquiets, pessimistes, en quête de repères et de sens, et n'ont plus suffisamment conscience des opportunités et des nombreux atouts de la France.
La France a su répondre aux rendez-vous - trop nombreux - que l’Histoire lui a donnés pendant ces quatre ans. Mais nous devons aussi reconnaître que nous avons eu du mal à être compris. Car l’exercice du pouvoir n’avait pas été suffisamment préparé avant 2012, et le camp progressiste ne s’était pas mis d’accord sur un diagnostic. Nous n’assumons donc pas pleinement tout ce que nous faisons. Nous ne donnons pas à voir la cohérence de nos actions, et les critiques systématiques et outrancières de certains à gauche sapent notre capacité de pédagogie et de conviction.
Nous estimons donc nécessaire une clarification sur le projet, les priorités et la stratégie avec lesquels nous abordons les échéances de 2017. L’enjeu, ce n’est pas l’identité de la gauche mais les réponses aux défis du pays. L’enjeu, c’est un rassemblement républicain des Français, pas une synthèse bricolée des socialistes.
Nous appelons donc tous les réformistes à s’unir pour permettre à la gauche de se rassembler et de se dépasser dans une stratégie de définition et d’impulsion d’un camp républicain. En ces temps de décomposition politique, l’affirmation d’un camp républicain n’est pas une recomposition politicienne, c’est une bataille idéologique centrale, qui opère une clarification à droite comme à gauche.
Nous devons avoir une stratégie globale pour 2017, qui englobe la présidentielle et les législatives. 2017 ne sera ni 2012, ni 2002. A la présidentielle, la clé du premier tour se trouvera dans la capacité des candidats à rendre crédible le rassemblement et la victoire du camp républicain, dans un second tour probable face au FN. Le candidat victorieux ne pourra ensuite compter sur une majorité parlementaire solide que si, aux législatives, il fait vivre dans son programme le rassemblement qui l’aura porté à la victoire. Le candidat de gauche, s’il l’emporte, devra donc tenir compte des candidats républicains de l’autre rive qui l’auront soutenu dès le soir du premier tour. L’enjeu, c’est donc le compromis et non l’affrontement. Un compromis qui ne nierait pas nos différences pas plus qu’il ne tuerait le débat démocratique. Mais un compromis sur l’essentiel : la défense de la République.
Si nous voulons demain montrer aux Français que nous avons tiré les leçons de ces quatre dernières années et les persuader de notre capacité future à transformer en profondeur notre société, il faut être en capacité de réimpulser une vraie dynamique ; d’engager une large réflexion avec les intellectuels, économistes, sociologues, philosophes, spécialistes des questions internationales ; de retisser la confiance avec les entrepreneurs, les artistes, les innovateurs ; de savoir ouvrir le dialogue avec tous ces Français qui, quelles que soient leurs origines politiques, intellectuelles, philosophiques, religieuses, pensent qu’il faut s’unir pour permettre à la France de retrouver sa place dans le monde, aux Français de renouer avec la confiance.
Face à la gravité des enjeux, nous exhortons la gauche à dépasser ses querelles, à se montrer suffisamment forte et ouverte pour prendre la tête de ce rassemblement du camp républicain et empêcher la victoire du bloc réactionnaire. Nous l’appelons à être à la hauteur de sa mission historique pour préserver notre République et notre Etat de droit, pour réaffirmer une espérance face à tous ceux qui prospèrent dans le «déclinisme» et poursuivre le redressement du pays, au service du progrès et de la justice.