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Libération

Le droit de controverse

publié le 5 septembre 2016 à 17h21

Dans le droit français, comme au niveau de la Cour européenne des droits de l’homme, la liberté d’expression est un droit fondamental, et celui des universitaires (comme des journalistes ou des politiques) est particulièrement protégé, au nom du droit à la libre discussion publique sur des sujets d’intérêt général. Comme dans tous les dossiers qui touchent à la liberté d’expression ou à la diffamation, les juges soupèsent, au cas par cas, le contexte dans lesquels ont été prononcés ou écrits les mots incriminés. Ainsi, plus le sujet abordé est polémique, plus la vivacité du ton est tolérée. Les juges étudient également la «bonne foi» du chercheur poursuivi pour diffamation - la liberté de choquer est largement tolérée quand elle cherche à aboutir à une vérité.

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme a déjà consacré la vaste liberté des travaux de recherche, en soulignant par exemple dans une décision de 2009 «l'importance de la liberté universitaire, qui comprend la liberté des universitaires d'exprimer librement leurs opinions au sujet de l'institution ou du système dans lequel ils travaillent et la liberté de diffuser sans restriction le savoir et la vérité». Ce qui ne veut pas dire que cette liberté de discussion universitaire est sans limite. «L'universitaire doit respecter une méthodologie de recherche pour se prévaloir d'une protection en cette qualité, note Nicolas Hervieu, juriste spécialiste du droit européen. De même, cette liberté universitaire comporte une nécessaire et logique contrepartie : le droit de libre critique des travaux universitaires, en particulier par les pairs du chercheur. Une sorte de droit de contre-interrogatoire universitaire.»