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Libération
Débat

Dieu a-t-il une place sur les bancs de l’école ?

(Photo Bruno Amsellem . Divergence)
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publié le 19 septembre 2016 à 18h01

L'école comme remède à tout ? Face à la radicalisation, aux replis identitaires, au désamour républicain, l'enseignement laïque des religions a souvent été avancé comme un antidote. «La relégation du fait religieux hors des enceintes de la transmission rationnelle […] favorise la pathologie du terrain au lieu de l'assainir», déclarait Régis Debray dans son rapport de 2002 sur la question. Si l'idée a gagné du terrain depuis le début des années 2000, elle s'est imposée comme une évidence après les attentats de 2015. Mais jusqu'où faut-il aller ? Là, les voix divergent. En cette rentrée, les débats se poursuivent entre ceux qui considèrent qu'une présence renforcée de la culture religieuse en français ou en histoire est suffisante, et ceux qui militent pour que le fait religieux devienne une discipline à part entière. Pour l'universitaire Sébastien Urbanski, le risque est de glisser vers un spiritualisme. Sur le terrain, des enseignants de Seine-Saint-Denis font appel au bon sens plutôt que d'imposer des grands principes.

Sébastien Urbanski: «Il faut veiller à ne pas glisser vers un spiritualisme»

Pour l’universitaire, le savoir sur les religions devient le moyen de faire société. Comment? Vif débat entre partisans d’une approche disciplinaire stricte et spriritualistes.

A droite comme à gauche, la nécessité d'un enseignement du fait religieux fait l'unanimité. Mais qu'y a-t-il derrière cette incantation ? Dans une société laïque, l'apprentissage de la tolérance doit-il passer par le religieux? Maître de conférences à l'université de Nantes, Sébastien Urbanski explore, dans l'Enseignement du fait religieux, qui vient de sortir aux PUF, la pluralité de positions sur ce projet éducatif en cours d'élaboration.

Enseigner le fait religieux à l’école est devenu la nouvelle marotte, mais de quoi parle-t-on ?

C’est tout le problème, il n’y a pas de réponse univoque. C’est devenu un slogan répandu qui recouvre des significations différentes.

Considérer l'élève au-delà de sa confession

Si Dieu surgit souvent dans leurs classes, ces professeurs de Seine-Saint-Denis rappellent la nécessité du dialogue et de ne pas se crisper sur les atteintes à la laïcité.

Dans nos classes surgissent des questions qui ont trait à la religion. Dieu a fait gagner le Real Madrid, a créé l’homme et permis d’avoir une bonne note. Quel est notre rôle en tant qu’enseignant ? Faire taire nos élèves ? La laïcité impose, comme il se doit, la neutralité aux personnels de l’Education nationale, mais n’interdit pas aux élèves d’exprimer un point de vue religieux. Les renvoyer à leur supposé obscurantisme et nous poser en seul détenteur de la vérité ? Quiconque a déjà dialogué avec un adolescent sait qu’il s’agit d’une impasse. Mais c’est également une confusion intellectuelle qui met sur le même plan discours religieux et discours scientifique. Ainsi, le créationnisme et le darwinisme ne sont pas deux théories alternatives de l’évolution du vivant : l’un est un récit d’inspiration religieuse, qui prend les habits de la science, l’autre est le produit d’une démarche scientifique, qui fait l’objet de discussions et qui se modifie selon l’avancée des recherches. Travailler cette distinction est l’enjeu de notre enseignement.