Une fois encore, cette année, il va falloir le marteler : ce mercredi n’est pas la fête des soutifs à prix bradés, ni la journée de la femme, mais bel et bien la Journée internationale des droits des femmes. Nuance. Mais pourquoi un 8 mars ? D’où et de qui émane cette idée ? Pour clouer le bec à tous ceux qui dévoient ce jour, Mathilde Larrère, maître de conférence en histoire contemporaine, spécialiste des révolutions et de la citoyenneté, a intégralement retracé l’an dernier, via Twitter, les véritables origines de ce 8 mars. «Je me suis aperçue que peu de gens les connaissaient», se souvient-elle.
Lénine
Et pour cause : pendant longtemps, une légende, née dans les colonnes de l'Humanité en 1955 puis largement véhiculée, voulait que ce rendez-vous soit un hommage à une grève d'ouvrières du textile new-yorkaises, survenue le 8 mars 1857. Sauf que deux chercheuses ont démontré au début des années 80 qu'il ne s'agissait que d'un conte, qui plus est démenti par le fait que ce jour-là était un dimanche… «Le projet d'instaurer une Journée internationale des femmes est né en 1910, à l'issue de décennies de revendications de militantes», affirme Mathilde Larrère.
Cette année-là, la journaliste et femme politique allemande Clara Zetkin soumet cette idée lors de la deuxième Conférence internationale des femmes socialistes, qui se tient à Copenhague. En ligne de mire : l'obtention du droit de vote, le droit au travail et la fin des discriminations. Aucune date précise n'est fixée, mais dès l'année suivante, en mars, des millions de femmes et d'hommes se mobilisent, notamment en Allemagne, au Danemark ou en Suisse.«En réalité, c'est Lénine qui, en 1921, fixera la date du 8 mars comme Jour international des femmes, en hommage aux débuts de la révolution russe de 1917», poursuit l'historienne.
Suffragettes
Le 23 février 1917 (soit le 8 mars dans le calendrier grégorien), des ouvrières de Saint-Pétersbourg sont en effet descendues dans la rue pour réclamer du «pain et la paix», vite rejointes par des suffragettes et par plusieurs milliers de personnes.
Assez logiquement, dès l'après-guerre, le 8 mars sera donc célébré dans les pays communistes, avant de prendre de l'ampleur, notamment avec les mouvements féministes des années 60-70. En 1977, l'Organisation des Nations unies appelle tous les pays à consacrer une journée aux droits des femmes et à la paix dans le monde. Cinq ans plus tard, la France mitterrandienne officialise la journée du 8 mars dans l'Hexagone. En grande pompe, le Président et sa ministre des Droits des femmes, Yvette Roudy, célèbrent ce nouveau rendez-vous du calendrier… et prient, sur le carton d'invitation, les 400 convives considérées comme des «femmes méritantes» de se rendre à l'Elysée vêtues d'une jupe.