Venus du Congo, les Belges occupent le Ruanda-Urundi allemand pendant la Première Guerre Mondiale. Mandatés par la SDN en 1922 puis chargés de Tutelle par l'ONU en 1946, ils ont mission de développer et de faire progresser le pays. En quarante ans, ils accomplissent peu et beaucoup. La masse paysanne reste économiquement sous-développée, seule une petite élite d'"évolués" accède au développement occidental. L'école, qui fait plus la morale que l'instruction, est un demi-succès: beaucoup d'appelés dans le primaire pour une infime minorité dans le secondaire qui seul débouche sur l'emploi. L'administration de l'État est "domino": les "autorités administrantes" sont "Européennes" quand l'administration coutumière noire est entre les mains des Tutsi et des propriétaires fonciers. La monarchie belge recouvre et contrôle la monarchie rwandaise, elle ne l'abolit pas. Du mwami aux sous-chefs, le royaume coutumier administre les terres, le cheptel, les travaux obligatoires. Ces coutumiers tutsi abusent de leur puissance en exploitant un petit peuple hutu, tutsi ou twa. Les missions chrétiennes ont beaucoup œuvré mais seule une moitié de la population est christianisée à la veille de l'Indépendance, en 1962. Si des progrès certains en santé publique ou en agronomie ont eu lieu, les sciences et les techniques importés par la mission civilisatrice (l'expression se trouve dans l'Accord de Tutelle) ont eu dans l'ensemble des effets réduits.
En quoi consiste la Révolution rwandaise de 1959-1961 ?
Une révolution politique a lieu. Elle est progressive et mène par étapes de la monarchie à la république. La suppression de l'ubuhake, en 1954, est un premier pas: la fin des contrats de cheptel libère le serviteur de son maître. Quatre ans de campagnes de presse, de palabres, de manifestes (cf. le Manifeste des Bahutu, 1957), de débats au Conseil Supérieur du Pays sur la "question sociale raciale" durcissent les camps "hutu" et "tutsi" et les préparent à la bataille électorale et à la guerre civile. L'indépendance est le souci de l'élite évoluée tutsi, la justice sociale est celui de la population et des leaders hutu. La mort subite du mwami Mutara III en juillet 1959 et le "coup de Mwima" qui met sur le trône Kiberi V à la barbe des Belges provoquent les premières actions politiques des partis.
En novembre 1959, les paysans qui se lèvent contre les autorités coutumières tutsi et les "gros" déclenchent le processus révolutionnaire. Le Résident Logiest prend le relais en nommant des Hutu à la place des Tutsi chassés par les incendiaires et en organisant des élections municipales au suffrage masculin que les partis hutu remportent largement en 1960. Les Belges soutiennent l'évolution politique qui mène à l'État moderne, capable d'autonomie et d'indépendance, alors qu'il faut aussi séparer ce nouvel État du Burundi. Le Conseil Spécial Provisoire, le Gouvernement provisoire, le Coup d'État hutu du 28 janvier 1961, l'éphémère République de Gitarama, les élections législatives au suffrage universel (et féminin) et le référendum de 1961 qui abolit la monarchie font passer progressivement le Rwanda de l'État doublement monarchique (belge et rwandais) à la République démocratique et indépendante. Les Hutu ont renversé les Tutsi, le mwami quitte son pays et ne reviendra plus. Cette révolution par étapes commencée en novembre 1959 est achevée en octobre 1961, elle a pris deux ans. Elle est l'œuvre des Belges et des évolués hutu que le colonialisme a "civilisés".
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