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Blog «Gay tapant»

Et vous le sida, vous en êtes où ?

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La question est peut-être directe, mais nous sommes sur le Gay tapant et elle se doit d’être franche. Avez-vous pris des risques sexuels et vous êtes-vous faits dépister récemment pour le VIH et autres IST ? La France dépiste beaucoup mais dépiste mal. C’est ce que nous apprend l’infectiologue Gilles Pialoux. Suivi d'un petit guide pratique du dépistage VIH et IST.
Tableau DR.
publié le 2 janvier 2018 à 14h27
(mis à jour le 2 janvier 2018 à 16h30)

Comme chaque année, Santé Publique France (ex InVS) a livré les chiffres en rapport avec l'infection. Pour être très clair, dit Gilles Pialoux sur son blog Medscape (accessible après inscription gratuite) : «ces chiffres ne sont pas bons. L'épidémie se poursuit à un niveau constant depuis 2013, date de déclaration obligatoire de la séropositivité VIH.» La seconde information est qu'on est toujours avec 6.000 nouveaux diagnostics par an même si ça fait moins de 4% d'incidence, et, parallèlement, on a une offre de dépistage du VIH qui reste clairement insuffisante dans notre pays.

Pour Gilles Pialoux : «la France reste pourtant le leader des pays européens pour le nombre de dépistages mais on dépiste trop de séronégatifs. On est à 5,4 millions de tests réalisés sur les chiffres de 2016, soit plus 5% mais on dépiste 5 cas pour 1 million de tests. C'est insuffisant compte tenu de la nécessité de faire du dépistage à la fois en population générale, pour que chacun puisse bénéficier d'un test et, comme cela est recommandé par la Haute Autorité de Santé (HAS), dans les populations les plus touchées et le plus fréquemment possible.» Les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), doivent bénéficier de 4 tests de dépistage par an, ainsi que les usagers de drogues et les ressortissants de pays de forte endémie (essentiellement Afrique subsaharienne). Ces deux groupes HSH et personnes originaires d'Afrique subsaharienne étant sans surprise les plus représentés sur ces 6000 nouveaux diagnostics.

Encore 27% de diagnostics tardifs

Il est important de noter que le système de déclaration du VIH en France inclut à la fois les nouvelles contaminations (données incidentes) mais aussi les diagnostics tardifs. «Effectivement, dit Gilles Pialoux, les diagnostics tardifs continuent de représenter 27% des nouveaux diagnostics c'est un taux très important et on n'arrive pas à les limiter. Il s'agit de personnes qui arrivent en consultation au stade Sida ou au stade d'immunodépression sévère avec des CD4 < 200/mm3.»

Pourtant, il existe des outils de diagnostic qui se sont multipliés : des TRODs (test rapide d’orientation diagnostique) faits dans un milieu communautaire ou par une infirmière. Plus de 53000 TRODs ont été réalisés, ce chiffre est en légère régression. Et le nouvel outil en 2016 était l’autotest, autour de 75000 autotests ont été vendus en 2016.

«Le constat est néanmoins essentiellement négatif, insiste Gilles Pialoux, en tout cas dans la capacité qu'a le système sanitaire français à banaliser les tests de dépistage, quitte à le coupler à d'autre dépistage puisque parallèlement à ces chiffres, on a les données alarmantes de l'augmentation des infections sexuellement transmissible (IST).»

Pas d’impact de la PrEp… pour l’instant

Pour Gillles Pialoux : «On attendait une influence de la mise à disposition de la PrEP (prophylaxie pré-exposition) sur les nouvelles contaminations dans la communauté homosexuelle mais les HSH représentent toujours la population la plus contaminée, pour l'instant, on n'a aucun signal dans ce sens.»

«Si l’on veut obtenir en France ce qui se passe à San Francisco, Vancouver, New York, Londres et Sidney, à savoir diminuer les contaminations grâce à la multiplication des outils de prévention et de dépistage, on a encore beaucoup de travail ! C’est l’objectif de l’ambitieux projet d’Ile de France «Paris sans Sida en 2030.»

«Sur 10 personnes qui découvrent leur séropositivité chaque année, 4 à 5 sont des HSH. Soit 40 à 50% alors que la population des HSH sexuellement actifs est estimée à 1,5 % de la population générale. C'est également la population la plus touchée par les autres IST (syphilis, gonorrhées, condylomes…).» Le risque de VIH et d'infection sexuellement transmissible (IST) reste donc très présent pour les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes, malgré les efforts qu'ils ont mis en place depuis le début de l'épidémie pour se protéger eux et leurs partenaires.

Quel dépistage pour vous?

Aujourd'hui, le préservatif n'est plus le seul moyen de prévention pour le VIH (mais le seul qui protège relativement contre les autres IST). Grâce à l'arrivée de nouveaux outils de prévention du VIH, plusieurs solutions existent pour se protéger et protéger ses partenaires d'un soir, de quelques jours, de plusieurs mois ou de la vie. Voir Le post «Le retour de la libération sexuelle».

Le 100% safe n’existe pas, c’est un leurre. Les préservatifs ne protègent pas à 100% du VIH et des IST (rupture de capote, glissement). Qui plus est de nombreuses IST dont le VIH peuvent s’attraper par simple fellation non protégée (ce qui se passe la plupart du temps, soyons honnêtes) ou par le simple fait d’embrasser (un chancre syphilitique dans la bouche de votre partenaire et hop, vous êtes infectés).

Les dépistages sont importants car la plupart des IST se soignent. Et il est primordial de connaître son statut sérologique VIH par un dépistage régulier car, si on ne guérit toujours pas du VIH, grâce aux traitements le risque pour une personne séropositive de transmettre le VIH est très fortement diminué. Une prise en charge précoce et adaptée est par ailleurs la garantie d’une bonne qualité de vie et d’une espérance de vie normale.

Se protéger contre le VIH et les autres IST est utile, rassurant et efficace, autant pour soi-même que pour ses partenaires.

Les dépistages permettent de détecter la présence de VIH dans le sang et des autres IST dans l’organisme. Il est recommandé de se faire dépister régulièrement et aussi souvent que nécessaire pour recevoir un traitement et éviter de transmettre l’infection à son/ses partenaires.

Que faut-il savoir sur les dépistages?

Le dépistage est le seul moyen de connaître son statut vis-à-vis du VIH et des autres IST. Beaucoup d’IST ne présentent pas de symptômes. Seul un dépistage permet de les détecter.

Chaque IST demande un dépistage spécifique, il faut donc faire un bilan complet pour bien connaître sa situation.

Une personne dépistée tôt et sous traitement efficace a la même espérance de vie qu’une personne séronégative.

Les éléments à respecter pour faire un dépistage

Il y a toujours un décalage entre la contamination et la possibilité de la détecter : c’est le temps de latence ou d’incubation.

Pour le VIH, cette période est d’environ 6 semaines. Elle peut aller jusqu’à 3 mois avec les tests moins sensibles comme les TROD (Tests Rapides à Orientation Diagnostique).

Pour les autres IST, cette période peut être de 5 à 20 jours, selon le type d’infection et les circonstances de la contamination.

Pendant cette période, la personne contaminée est très contagieuse, même s’il n’y a pas de symptôme apparent.

Quand faut-il se faire dépister?

Pour le VIH : Si l'on a plusieurs partenaires sexuels, il est recommandé de se faire dépister tous les trois mois. Dans tous les cas, un dépistage est conseillé au minimum une fois par an et chaque fois que l'on a un doute.

Pour les autres IST : pour ceux qui ont une activité sexuelle régulière avec plusieurs partenaires, il est conseillé de faire une recherche des autres IST en même temps que le dépistage du VIH et à chaque fois qu'on a des symptômes ou que l'un de nos partenaires a une IST.

Il est important de noter que la plupart des contaminations n’ont aucun symptôme visible, ce qui signifie qu’aucun signe ne permet de les déceler. C’est pour cela qu’il est recommandé de faire des dépistages réguliers.

Et si vous avez un résultat de test positif, pensez à prévenir vos partenaires sexuels ! C’est important pour qu’ils soient aussi pris en charge.

Où peut-on se faire dépister?

Les dépistages s'effectuent dans des laboratoires d'analyses de biologie médicale, dans des centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic du VIH, des hépatites virales et autres IST (les CeGIDD) et auprès d'associations habilitées dans certains lieux publics. On peut également le faire chez soi pour le VIH avec un autotest que l'on peut acheter en pharmacie. L'important est de choisir un lieu où l'on se sent en confiance.

En laboratoire (remboursé sur ordonnance d’un médecin) pour le VIH et les autres IST. On en trouve de nombreux près de chez soi.

Test en CeGTDD (centre gratuit d’information et dépistage et de diagnostic pour le VIH et les autres IST). C’est gratuit, anonyme et sans rendez-vous.

Test rapide dans une association (TROD : test rapide d’orientation diagnostique) pour le VIH, l’hépatites C et pour l’hépatite B (bientôt disponible). Résultat du test VIH en 20 minutes, accompagné par des pairs, gratuité, anonymat.

L’autotest VIH comme son nom l’indique ne concerne que les VIH et pas les autres IST. Il est en vente en pharmacie. Il est flexible : le faire quand on veut, quand on peut. Résultat du test en 20 minutes.