Les missions essentielles d’une municipalité sont notamment de veiller au bon fonctionnement des écoles, au logement décent de ses administrés, aux transports, à la qualité de l’air et plus largement à l’environnement de ses concitoyens. Le drame de la rue d’Aubagne, en plein cœur de Marseille, jette une lumière crue sur les carences multiples et hélas très profondes de la municipalité de Marseille dans l’ensemble de ces domaines.
Comment qualifier autrement une administration municipale qui reste sourde aux appels au secours renouvelés des habitants des immeubles qui se sont écroulés ? Comment qualifier une attitude assumée qui laisse un immeuble en péril sans surveillance régulière malgré les rapports d’expertise ? Comment accepter qu’à Marseille bien plus que dans toutes les autres grandes villes de France, tant d’habitants, au mépris de leur santé et même nous en avons désormais la preuve, au péril de leur vie, vivent dans des logements insalubres, indignes de notre pays ? Pendant ce temps, les projets d’hôtels ou d’immeubles de luxe poussent comme des champignons.
La manne touristique
Pendant ce temps, la Ville trouve l’argent pour restaurer les façades tout le long du parcours d’une ligne de tramway, entre Castellane et la Joliette, ambition touristique oblige. Et derrière ces façades, on trouve des logements insalubres, occupés par tant de personnes que les facteurs mettent deux à trois plus de temps pour distribuer leur courrier que sur une rue normale. Pendant ce temps, sans aucune concertation avec la population, la ville entreprend le reformatage d’espaces urbains – en l’occurrence la place Jean-Jaurès dans le quartier de la Plaine –, contre l’avis d’une grande partie de ses habitants.
Tant d’amateurisme avéré et d’incurie aujourd’hui généralisée ne peut que jeter le discrédit sur l’ensemble de la classe politique quand il conviendrait de ne pointer du doigt que ceux pour qui la ville est un terrain de jeu pour appétits affairistes au détriment de l’intérêt collectif. Du point de vue de l’action publique, Marseille donne l’impression de ne plus être «administrée» et cela depuis fort longtemps, la faute à un maire et son équipe municipale qui n’interviennent plus qu’au cas par cas notamment lorsqu’il s’agit de distribuer ici ou là aux proches et aux amis. Nous en voulons pour preuve la très récente répartition voulue par la majorité municipale concernant les Maisons Pour Tous qui sont au cœur de l’action sociale dans les quartiers. Une sélection partisane a ainsi privilégié de façon éhontée des structures sans expérience réelle ou, pire encore, se trouvant endettées ou en redressement judiciaire (sic), et ce au détriment d’organismes sociaux expérimentés et appréciés des habitants.
Ne nous racontons pas d’histoires, en France, il n’y a qu’à Marseille que l’on observe – en tout cas à ce niveau de généralisation – de tels comportements indignes. Il faut que cela cesse. Beaucoup de Marseillais attendent la démission du maire et de son équipe. L’Etat pourrait aussi prendre ses responsabilités en mettant la ville sous tutelle préfectorale. C’est arrivé dans le passé, en 1939. Les circonstances, tragiques, s’y prêtent de nouveau aujourd’hui. Car ce qui s’est passé rue d’Aubagne est d’une gravité exceptionnelle. Et il ne serait pas illégitime que l’Etat, avec du reste l’assentiment d’un très grand nombre de marseillais, prenne ses responsabilités.
Pour une politique cohérente
Il est temps également que les Marseillais se saisissent des enjeux de leur ville et de son avenir. Il y a dans cette ville, une richesse de compétences, de créativité qui permettront, nous en sommes sûrs, de produire des actions municipales cohérentes et concertées bénéfiques à ses habitants, bien loin d’une politique à la «godille» qui a cru que la manne touristique allait par un coup de baguette magique faire disparaître les écoles vétustes, les logements insalubres, les emplois insuffisants, les transports collectifs trop parcimonieux, la pollution et sans doute réduire la fracture sociale entre des quartiers suréquipés dans tous les domaines et le reste de la ville à l’abandon depuis trop longtemps.
Au-delà des immeubles de la rue d’Aubagne, c’est Marseille qui est à reconstruire. La renaissance de Marseille est possible. Nous la voulons, nous y croyons.
Signataires: Annie Levy-Mozziconacci conseillère municipale et métropolitaine, présidente et cofondatrice de l'association I2m Innovons Pour Marseille Métropole (innovonspourmarseille.fr), Cécile Sportis conseillère honoraire des Affaires étrangères, ABS Richard chirurgien plasticien, Marseille, Anktll Arno bénévole associatif, Azibi Gérard conseiller d'arrondissement, Barthes Pascale ingénieure d'étude à la Drac Beaulieu Lise monteuse, Bely Pascal consultant pour le secteur public et associatif, Benalloul Franck avocat au barreau de Marseille, Benhahmias Jean-Luc député Européen (2004-2014), coprésident de l'Union des démocrates et des écologistes (UDE), Benghozi Célia enseignante à l'institut des Beaux-Arts, Bianciotto Mireille journaliste indépendante, Billerey Marie retraitée fonction publique hospitalière, Brun Boffa Virginie professeure des écoles, Bouguereau Jean-Marcel journaliste, Brenier Mireille retraitée association parents enfants handicapés, Brun Roubereau Nicole retraitée Enseignement supérieur, Caubère Philippe comédien, auteur et metteur en scène, Cazaux Claude retraitée, Chalom Yvette psychologue retraitée, Charles Isabelle orthophoniste; Chevalier Eric retraité, Coja Gu membre associatif, Colomb Philipe délégué général, association lutte contre le cancer, Crespeau Virginie réalisatrice multimédia, Daod Nathoo Nathalie, infirmière, Dartevelle Daniel chirurgien digestif, Dartevelle Ode professeure de Lettres, documentaliste, Dejasmin Agnes juriste, consultante indépendante, Dermenjian Geneviève maître de conférences honoraires, Université Aix-Marseille, Dragon Jean médecin, Elmaleh Léon retraité, Fourest Alain retraité, militant associatif, Franco Christophe électricien écoresponsable, trésorier et coadministrateur de l'Association Santé Littoral Sud, Gaussen David éditeur, Giral Catherine membre associatif, Guilcher Armelle retraitée du ministère de la Culture, Guilcher Dominique retraitée, Guillaume Christian, retraité, habitant Marseille depuis très longtemps, Guillaume Mireille retraitée, habitant Marseille depuis très longtemps, Gounni Meriem, infirmière libérale, Idoux Guylaine journaliste indépendante et riveraine des 63-65, rue d'Aubagne, Jacquemot Pierre, ancien ambassadeur, Kehayan Jean, journaliste et essayiste, Kehayan Nina, écrivaine et traductrice, Kakouridis-Torres Thierry professeur, Lycée Thiers, Marseille, Lagaye Lucien retraité, Lao Michel avocat, Laval Sylvie Association ASLS, Lourie Rolande conseillère pédagogique Éducation nationale, Lourie Serge professeur d'EPS (retraité) Éducation nationale, Malapris Christian ingénieur de Recherche en communication, Marsilio Emilie professeure des écoles à Marseille, Massart Clémence, actrice, Matéo Sylvie enseignante spécialisée, Merabet Nabil, salon coiffure Kenze, Meynet M-Hélène retraitée, Michel-Martin Roland journaliste, Nouar Adel, évacué du 5 rue Jea-Roque, Pagni Mireille retraitée, Paul Maryvonne retraitée Education nationale, Perelli Gérald journaliste, Plazonnet Catherine retraitée de l'Education nationale, Quilici Ingrid infirmière psychiatrique, Raffaelli Bruno sociétaire de la Comédie Française, Ripoll Françoise médecin, Soune Wade propriétaire à Marseille, Thomazeau François, journaliste, écrivain et éditeur, Trignac Cyrille professeur des écoles, Vienne Chloé journaliste.