En partenariat avec la Fédération Parapluie Rouge, nous relayons les témoignages de travailleurSEs du sexe recueillis au mois de novembre 2018 sur l'impact de la pénalisation des clients sur les conditions de vie et de travail. Cette collecte de témoignages se déroule dans le cadre de la Question Prioritaire de Constitutionnalité actuellement en cours concernant la pénalisation des clients.
Les personnes dont nous relayons les témoignages sont issues de communautés variées de travailleurSEs du sexe : femmes cisgenres, transgenres, hommes cisgenres, transgenres, travaillant dans la rue ou sur internet, maîtrisant le français ou non, ayant un titre de séjour en France ou non. Le constat est encore une fois sans appel : la pénalisation des clients nuit aux travailleurSEs du sexe, quel que soit leurs modalités d’exercice, quel que soit le degré d’autonomie dont elles disposent dans leur activité, quelle que soit leur situation au regard du séjour en France. Pour des raisons de garantie d’anonymat, les prénoms ont été modifiés et nous ne publions pas l’origine du témoignage.
"Je travaille dans une camionnette depuis de nombreuses années et j'ai vu mes conditions de travail se dégrader depuis le vote de la loi, ou plutôt depuis les débats préparant la loi. Les clients maintenant pénalisés sont de moins en moins nombreux à venir nous voir car ils ont peur de se faire arrêter. Cela a des répercussions sur l'argent que je gagne et qui me sert à payer mes factures. Depuis la loi, j'ai dû augmenter mon temps de travail. Travaillant en journée, je venais le matin et finissais habituellement vers 14h. Aujourd'hui je dois terminer vers 19h ou 20h alors que je ne gagne pas autant qu'avant.
Aujourd'hui aussi, de plus en plus de clients nous demandent des passes sans préservatif. C'est très dangereux et on essaie de ne pas accepter mais jusqu'à quand? Et enfin on a de plus en plus d'agressions. Je travaille en journée et on avait moins de violence que les femmes qui travaillaient la nuit, mais aujourd'hui, on assiste à des agressions en pleine journée, par des mecs avec des couteaux ! Ils viennent nous prendre notre argent en nous menaçant. Ces dernières semaines, c'est une dizaine de mes collègues qui ont été agressées comme ça.
La police, qui passe souvent pour nous chasser et nous mettre des amendes, fait peur aux clients, mais ne vient pas quand on est agressées et qu'on les appelle. Et les agresseurs, ils n'ont plus peur parce qu'il y a moins de clients et de gens qui tournent dans nos lieux de travail. La pénalisation des clients ne nous aide pas, il faut l'enlever"
Sheila