Tribune. Quelques mois après sa prise de fonction, le Président Macron a annoncé mettre la politique de développement au cœur de la politique étrangère de la France et à cette fin relever ses moyens pour atteindre 0,55% du revenu national brut en 2022. Il a ensuite souhaité que la prochaine loi d'orientation pour le développement soit assortie d'une programmation budgétaire permettant d'inclure cette trajectoire. Nos organisations, associations actrices de la solidarité internationale avec toutes celles et ceux qui sont engagés au quotidien pour cette cause, avaient salué ces annonces. Il était attendu que cette loi soit votée au printemps 2019, ce qui aurait été une façon concrète pour la France de prouver son engagement à l'occasion de l'accueil du G7 en août et de la présentation de sa feuille de route pour les Objectifs de développement durable (ODD) aux Nations unies en septembre.
Et puis, report après report, le projet aboutirait au mieux à l’automne 2019 ! La France a certes engagé un redressement de son aide publique, mais cela demeure sur une courbe trop faible. En l’absence de la visibilité que doit donner la loi, nous sommes amenés à nous interroger sur l’actualité de l’ambition posée initialement. Quel sens aurait une programmation budgétaire décidée pour les deux seules dernières années du quinquennat ?
Contribution solidaire de la France
Comment comprendre et accepter qu’on ait des déclarations fortes et répétées sur les enjeux internationaux (accord de Paris, ODD) et constater à la fois retard et absence de calendrier pour la présentation de cette loi ? Traduction des ambitions françaises en matière d’aide publique au développement, cette loi ne peut plus attendre car elle est aussi l’incarnation de la contribution solidaire de la France à l’équilibre du monde.
Chaque jour, l’actualité nous rappelle les effets dramatiques des dérèglements climatiques, de la pauvreté, de la faim et des inégalités sociales, des discriminations de genre et des violences faites aux femmes. Les zones de crise humanitaire s’étendent, notamment celles dues aux conflits. Nos organisations sont mobilisées parce que nos sociétés sont interdépendantes, parce que les enjeux auxquels nous faisons face sont universels et parce qu’il ne peut y avoir de réponse durable dans un seul pays. C’est ce que consacrent l’agenda 2030 du développement durable et l’accord de Paris en 2015.
Agenda gouvernemental
Les citoyennes et citoyens en France en sont conscients. Conscients de l’urgence climatique et solidaire comme l’ont démontré notamment leurs contributions au Grand débat national et leurs mobilisations régulières depuis des mois. Leur lucidité quant à la communauté de destin qui lie tous les peuples du monde explique que notre société est profondément attachée à la solidarité internationale et à l’action des ONG pour la mettre en œuvre comme le montrent les derniers sondages (1).
Une accélération est indispensable pour redonner force à cette politique. Nous la souhaitons ambitieuse dans ses objectifs et dédiée aux droits humains, à la lutte contre la pauvreté, les inégalités et le déréglement climatique. Nous la souhaitons ambitieuse aussi dans ses moyens pour atteindre 0,55% du revenu national brut en 2022 et fixer l’objectif de 0,70% en 2025. Nous souhaitons que l’aide publique au développement donne une place centrale aux pays partenaires dans les choix des priorités, avec la pleine participation de la société civile, ici comme dans les pays partenaires, pour plus de proximité, d'efficacité, de participation et d’appropriation démocratique. Nous la souhaitons centrale enfin dans l’agenda gouvernemental afin que toutes les politiques publiques soient mises en cohérence avec ses objectifs.
En matière de solidarité internationale, l’urgence est dramatiquement là, il s’agit d’y répondre avec davantage que des mots.
(1) Baromètre AFD/CSA 2019 : Les Français et la politique d'aide au développement, Paris, AFD/CSA, Avr. 2019
Signataires : Coordination SUD, Philippe JAHSHAN, président ; Oxfam France, Cécile DUFLOT, directrice générale ; Etudiants & Développement, Ruvie GAMBIA, président ; ACF, Thomas RIBEMONT, président ; GRDR Migration-Citoyenneté-Développement, Francis MONTHE, président ; Humanité & Inclusion / Handicap International, Manuel PATROUILLARD, directeur général fédéral ; Secours islamique France, Rachid LAHLOU, président ; Médecins du monde, Philippe de BOTTON, président ; CHD, Thierry MAURICET, coprésident ; Secours catholique - Caritas France, Bernard THIBAUD, secrétaire général ; CCFD - Terre solidaire, Sylvie BUKHARI DE PONTUAL, présidente ; CRID, Emmanuel POILANE, président ; GRET, Olivier BRUYERON, directeur général ; SOS Villages d'Enfants France, Isabelle MORET, directrice générale ; Groupe Initiatives, Pierre JACQUEMOT, président ; CLONG-Volontariat, Guillaume NICOLAS, vice-président ; Forum des Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations (FORIM), Thierno CAMARA, président ; La Chaîne de l'Espoir, Jean-Roch SERRA, directeur général ; EDUCASOL, Carole COUPEZ, présidente ; AIDES, Aurélien BEAUCAMP, président ; Ligue des droits de l'Homme, Malik SALEMKOUR, président ; Le Planning Familial, Véronique SEHIER, coprésidente ; CARE France, Philippe LEVEQUE, directeur général ; Fondation Energies pour le Monde, Vincent JACQUES le SEIGNEUR, directeur général ; ECPAT France, Emilie VALLAT, directrice ; HAMAP-Humanitaire, Joël KAIGRE, président ; Réseau Foi & Justice Afrique Europe antenne France, Jean-Louis MAROLLEAU, secrétaire exécutif ; Association HUMATEM, Cathy BLANC-GONNET, directrice-coordinatrice ; Comité Français pour la Solidarité Internationale, Yves LE BARS, président ; SOLTHIS, Louis PIZARRO, directeur général ; MEDAIR France, Annick BALOCCO, directrice ; F3E, Pauline DE LA CRUZ, présidente ; Planète Enfants & Développement, Stéphanie SELLE, directrice ; Coalition Eau, Sandra METAYER, coordinatrice ; Solidarité Laïque, Anne-Marie HARSTER, présidente ; Agronomes et Vétérinaires sans Frontières, Frédéric APOLLIN, directeur ; Ingénieurs sans frontières, Guillaume NATAF, président ; Initiative Développement, Marie-Françoise PLUZANSKI, présidente ; GERES, Laurence TOMMASINO, déléguée générale ; Acting for Life, Bertrand Lebel, directeur exécutif ; Action Santé Mondiale, Bruno Rivalan, directeur exécutif adjoint ; CEMEA, Jean-Luc CAZAILLON, directeur général ; Réseau Associatif pour le Développement et la Solidarité Internationale ; Nouvelle-Aquitaine (RADSI Nouvelle-Aquitaine), Josyane Pérez, présidente ; Plan International France, Yvan SAVY, directeur ; Terre des Hommes France, Lysiane ANDRE, présidente ; Aide et Action, Gwenaëlle BOUILLE, présidente ; One, Friederike RÖDER, Directrice Union européenne et France ; Cnajep, François MANDIL, président ; Asso 4D, Benoît SIMON, président ; Futur Au Présent International, Matthieu GAUTIER, directeur Général ; ATD Quart Monde, Paul Maréchal, Délégué national ; APDRA – Pisciculture paysanne, Claire GSEGNER, présidente ;RéCiDev, Patrice BERNARD, président