Réglons d’abord les affaires courantes à l’heure où les Bleues viennent d’accéder aux quarts de finale du Mondial de foot.
Faveur publique
Il est étonnant de découvrir combien les audiences des matchs féminins rivalisent avec ceux de la Coupe du monde masculine.
On peut y voir banalement un signe de l’impérialisme du ballon rond. Ce qui ferait que, quelle que soit la déclinaison de la compétition, par sexe, âge ou continent, la boule de cuir gagnerait à tous les coups à la roulette du Loto sportif. Et qu’elle rejetterait dans les limbes les disciplines concurrentes, qui n’auraient plus que leurs yeux pour pleurer.
On peut aussi espérer un mécanisme de compensation. Les populations auraient depuis tellement longtemps pris l’habitude de visualiser les garçons en Bleus qu’elles admettraient qu’il est enfin temps d’habiller les filles en Bleues et pas en rose. La durée de vie de cette empathie n’est pas garantie et pourrait vite être corrigée des variations saisonnières, pour cause de chauvinisme insatisfait, d’attentions dispersées et de sollicitations augmentées.
Salaires comparés
Wendie Renard et Amandine Henry émargent à 30 000 euros brut environ. Ce qui fait moins de 1 % du salaire mensuel d’Antoine Griezmann. Et cela descend vite, la moins dotée tournant à 1 700 euros. Si je suis pour l’égalité salariale, je suis aussi pour le revenu universel et le partage des richesses. Il n’est pas certain que les joueuses françaises me rejoignent sur ce point. Elles semblent résignées quant aux réalités économiques et à l’accès à la valeur générée. Elles aimeraient juste en accaparer une part améliorée.
Critique et caricature
Bienvenue mesdames dans le monde cruel de la notoriété ! Désormais, les filles aussi sont notées à la badine par les journalistes sportifs et doivent essuyer les borborygmes des chroniqueurs vanneurs. Cette rançon de la gloire marque la fin d'un paternaliste méprisant et d'un maternalisme militant. Et c'est tant mieux ! Comme il est salubre que Charlie Hebdo, qui vomit la footocratie mâle comme femelle, dessine un clito rond comme un ballon, à l'image de la transformation passée de Griezmann en vibromasseur.
Passons maintenant à une proposition qui devrait liguer contre elle les deux sexes enfin coalisés. Il serait intéressant d’essayer le foot mixte avec des équipes paritaires et un goal réversible à la mi-temps.
L’intérêt sportif du mélangisme
La condition physique des hommes a tellement progressé que le terrain devient trop petit pour leur énergie. Le niveau de préparation a tellement augmenté que cela se joue souvent sur un coup de dés.
Chez les femmes par contre, l’intensité est moindre. La vitesse est limitée et les chocs moins brutalistes. Cela permet de redécouvrir des subtilités tactiques et d’apprécier comme au ralenti des séquences techniques oubliées. Mixer les deux engeances comme ça existe peu dans les sports collectifs permettrait de fluidifier les séquences de jeu et de varier les stratégies. Il s’agirait pour les duos d’entraîneurs d’allier les contraires et de panacher rois et reines, fous et cavalières, pions et tours. Et l’on verrait comment s’agenceraient les postes et se maçonneraient les murs au moment des coups francs.
L’argument telenovela
Le monde du foot est devenu un réservoir à histoires où s’emplafonnent amour, gloire, beauté, sans oublier l’argent évidemment. Question sexualité, tout est pour l’instant très genré et pas fluide du tout. Les hommes vont au boulot en soldats du gagne-pain quand les épouses et concubines se concentrent sur la reproduction de l’espèce et le repos du guerrier. Et cela sans parler des chopeuses de stars et des travailleuses du sexe qui assurent l’extraction des plaisirs contingents, tarifés avant ou après. Les unes et les autres se partageant les pensions compensatoires et les arrangements négociés d’après étreintes plus ou moins consenties et plus ou moins mises en scène.
Au bout d’une très longue évolution, les femmes joueuses devraient réussir à reproduire le modèle de ce développement séparé. Et elles finiraient ainsi ouvrières de luxe au turbin, assurant l’entretien des époux, gigolos ou gigolettes.
Avec le foot mixte, on irait illico vers un fonctionnement plus égalitaire. Pour les gazettes en réseaux, les relations au sein des équipes prendraient une autre envergure. L’enjeu ne serait plus seulement technico-tactique, il serait aussi sentimentalement prescripteur. Il y aurait des amours de bureau, des idylles qui débuteraient sur les tables de massage et des «trouples» spécialistes du jeu en triangle. Les jalouseries, les fâcheries et les alliances de circonstance qui existent déjà deviendraient plus croustillantes et plus métaphysiques à la fois. On se demanderait si tacler, c’est harceler ? Si déborder sur l’aile, c’est tromper ? Et si le sifflet des arbitres doit être remplacé par un bip électronique ?