Tribune. Aucun pays de l'Union européenne, dont la France, n'a encore adopté de loi permettant de limiter le réchauffement à 1,5°C, ni même 2°C. Présidents, chefs de gouvernement, ministres de l'Ecologie nous assènent pourtant à grands coups de discours grandiloquents et de communication ubuesque qu'ils font tout ce qui leur est aujourd'hui possible pour enrayer la catastrophe en cours.
Pourtant nous savons qu’ils peuvent faire plus. Nous savons que les victimes de la dégradation environnementale, des centaines de défenseurs et défenseuses du climat assassiné·e·s chaque année aux victimes toujours plus nombreuses des épidémies liées au réchauffement climatique, de la montée des eaux, de la fonte des glaces, des vagues de chaleur n’en peuvent plus d’attendre. Nous savons que les solutions existent, si tant est que l’argent cesse de nourrir les énergies fossiles sursubventionnées, l’aviation, le transport maritime… pour nourrir la multitude d’initiatives écologiques sur nos territoires.
Combats
Tout ce que nous faisons, c’est leur réclamer une action résolue. Dans les rues, à travers nos pétitions et actions en justice, ou via des actions de désobéissance civile. Notre seul tort : être déterminé·e·s à protéger le vivant et l’avenir de nos enfants, parfois déjà le nôtre, à préserver une planète habitable. Nos combats ne peuvent être vains. Pour l’instant, seuls des mots ont été apportés à notre requête légitime. Et comme notre colère exprimée par les voies inoffensives ne réveille manifestement pas les dirigeant·e·s politiques de notre pays, ni des pays voisins, nous nous sommes emparés d’un noble outil de l’action : la résistance non violente.
«Celui qui accepte le mal sans lutter contre lui coopère avec lui» disait Martin Luther King. La désobéissance civile non violente émerge là où l'action publique est illégitime, ou carrément illégale, comme l'est l'inaction climatique et environnementale. Elle fut utilisée contre le colonialisme, contre l'apartheid et l'esclavage ; par les faucheurs d'OGM, pour l'égalité devant le mariage, ou contre la dangereuse industrie nucléaire. Les femmes ont payé cher leur désobéissance lors de recours à un avortement longtemps interdit ; elles le font d'ailleurs encore en Europe.
Les militant·e·s du climat et de la planète y font aujourd’hui appel : pour protéger les forêts européennes comme la dernière forêt primaire de Bielowieza en Pologne, ou l’une des plus vieilles forêts d’Europe, à Hambach en Allemagne, face à l’appétit des charbonniers ; elle est utilisée contre les aéroports, d’Heathrow en Grande-Bretagne à Notre-Dame-des-Landes ; elle l’est aussi en France, contre les pollueurs, de Monsanto à Total.
Malotrus
Ce vendredi, les militant·e·s d’Extinction Rebellion et les jeunes de Youth for Climate ont été encerclés, gazés, violentés à Paris par les forces de l’ordre. Le ministre de l’Ecologie a indiqué qu’en effet, il s’agissait de débarrasser les rues de ces malotrus qui venaient déranger l’ordre établi. Ce n’est pas un cas isolé. Des dizaines de militant·e·s d’Action non violente COP21 ont été arrêtés ces dernières semaines, avec pour seul tort d’avoir ôté des portraits du Président de leurs mairies. En Grande-Bretagne, Extinction Rebellion compte plus d’un millier d’arrestations de ces militant·e·s non violent·e·s.
Partout dans l’Union européenne, l’heure est à la répression des libertés civiles et politiques. En Hongrie et en Pologne, bien sûr. Mais aussi en France, où le droit de manifester est entaché par des ordres du ministère de l’Intérieur qui visent à dissuader la participation à des mobilisations citoyennes. Plutôt que de réprimer ces résistant·e·s du vivant, la France devrait montrer l’exemple et enjoindre l’Union européenne à protéger celles et ceux qui, à travers leurs mobilisations, se battent pour la plus noble cause qui soit : la survie du vivant, et la vie de nos enfants.