Questions à... Marc Maillot, directeur de la Section française de la direction des Antiquités du Soudan (SFDAS).
Après avoir soutenu un Doctorat en Égyptologie à l'Université Paris IV-Sorbonne, Marc Maillot a récemment été nommé directeur de la SFDAS. Spécialisé dans l'architecture méroïtique et vernaculaire, il participe aux missions françaises de Saï (SFDAS/CNRS) et d'el-Hassa (Louvre/SFDAS/NCAM/CNRS). Il est également membre associé du laboratoire Orient et Méditerranée, composante mondes pharaoniques (UMR 8167 CNRS) depuis 2013, et professeur assistant associé à la section Anthropologie de l'Université centrale de Floride depuis 2015.
La SFDAS fête ses 50 ans : comment avez-vous célébré cet anniversaire scientifique ?
En 2019, la SFDAS célèbre ses cinquante ans d'existence. Une semaine complète consacrée à la SFDAS et au patrimoine soudanais s'est tenue du 15 au 20 septembre 2019 à l'Institut Français de Khartoum et au Musée National du Soudan, ces évènements étant placés sous l'égide de l'Ambassade de France. Cette semaine, composée de conférences archéologiques assurées par les plus grands spécialistes et anciens directeurs de la SFDAS, s'est ouverte avec une exposition consacrée à l'archéologie française à l'Institut Français, autour du travail de Claude Iverné, membre associé de la SFDAS.
Photographe majeur sur le Soudan, Claude Iverné est lauréat du prix Henri Cartier-Bresson 2015 pour l'ensemble de son travail soudanais. Certains des plus importants clichés des monuments du patrimoine soudanais sont à porter au crédit de Claude Iverné, et son dernier ouvrage en date, Bilad es-Sudan (éd. Xavier Barral, 2018), prouve l'importance de son travail pour la reconnaissance du Soudan auprès de la communauté internationale. La photographie de Claude Iverné, après vingt ans de carrière dédiée au Soudan et en plein essor grâce à l'obtention du prix HCB, a trouvé sa pleine ampleur au sein du cinquantenaire de la SFDAS.
Pouvez-vous nous présenter la SFDAS ?
Fondée en 1967 sur une initiative de Jean Vercoutter, la SFDAS a été officiellement créée en 1969. Elle a été dirigée successivement par André Vila (1969-1975), Francis Geus (1975-1984), Jacques Reinold (1984-2000), Francis Geus (2000-2004), Vincent Rondot (2005-2009), Claude Rilly (2009-2014), Vincent Francigny (2014-2018) et depuis 2019, par Marc Maillot. Chargée de coopérer avec la Direction des Antiquités soudanaises dans ses activités de terrain, fouilles et prospections, elle a participé aux opérations de sauvetage de la campagne de Nubie, qui précéda la mise en eau du lac de retenue du barrage d’Assouan dans les années 1960. Elle fut ensuite chargée de poursuivre le recensement systématique des sites de la vallée du Nil au sud de ce lac. Elle a également effectué plusieurs fouilles programmées, notamment à Missiminia (nécropoles napatéenne, méroïtique, groupe X et chrétienne), el-Kadada (nécropole néolithique, méroïtique et post-méroïtique), Kadrouka (tertre funéraire néolithique) et el-Hobagi (tumuli post-méroïtiques). Elle est aujourd’hui présente sur l’ensemble de la vallée du Nil Moyen, avec les sites archéologiques de Saï, Sedeinga, el-Hassa, et Soleb.
La SFDAS constitue l'un des 27 IFRE (Institut Français de Recherche à l'Etranger) dépendant du Ministère de de l'Europe et des affaires étrangères et du CNRS. La SFDAS est régie par le « Protocole relatif à la coopération en matière archéologique » de « l'Accord de coopération culturelle et technique entre le gouvernement de la République démocratique du Soudan et le gouvernement de la République française », signé à Khartoum le 22 décembre 1969. Il y est précisé que la SFDAS « est intégrée au Service des antiquités du Soudan » (désormais National Corporation for Antiquities and Museums, NCAM), qu'elle « a pour rôle de procéder à des fouilles et relevés topographiques ainsi qu'à des travaux de laboratoire et de documentation » et que son directeur « est responsable de son département devant le directeur des Antiquités ». C'est ce statut mixte qui lui garantit entre autres la mise à disposition à titre gracieux de locaux dans le Musée national du Soudan.
Quelle place occupe l’archéologie dans les relations franco-soudanaises ?
La SFDAS engage en propre des fouilles ou des prospections dont elle assure la publication et coopère aux programmes scientifiques et archéologiques engagés par la NCAM. Elle contribue à la formation des responsables du patrimoine soudanais (Antiquities Officers) par des bourses en France et des formations locales avec des écoles de fouille sur des chantiers français. Enfin, elle accueille des étudiants inscrits en master ou en doctorat en archéologie soudanaise dans les universités françaises par des allocations d'aide à la mobilité internationale (AMI) pour des durées longues (9 mois) ou brèves (2 mois).
La SFDAS joue un rôle phare dans la coopération franco-soudanaise, étant donné les liens relativement lâches entre les deux pays, qui s’expliquent pour des raisons historiques. Le fait que les fonctionnaires les plus importants du Service des Antiquités du côté soudanais soient docteurs d’universités françaises et parfaitement francophones montre bien comment la France a ici réussi une coopération scientifique exemplaire et de long cours. La solidité de cette relation entre la SFDAS et le Service des Antiquités du Soudan est ainsi établie pour encore de nombreuses années. La formation en France des archéologues soudanais sera poursuivie pour assurer la pérennité de cet atout majeur, et les chantiers archéologiques placés sous le patronage de la SFDAS sont à ce titre un exemple de coopération bilatérale.
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Pour aller plus loin :
[ Palais et grandes demeures du royaume de Méroé ]
[ éditions Soleb — Histoire et civilisations du Soudan, de la Préhistoire à nos jours ]
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