Ils sont sous le feu des projecteurs lorsque leurs habitants enfilent le gilet jaune. Ou lorsque le Rassemblement national (RN) est en tête aux élections. Mais au-delà, circulez, y a rien à voir : les espaces ruraux les plus éloignés des grandes villes, ces «campagnes en déclin» marquées par la désindustrialisation et le vieillissement de la population, seraient à l'image des bistrots et épiceries des villages, déclinants, vides et sans vie. Né dans l'un de ces territoires, quelque part dans le Grand-Est, le sociologue Benoît Coquard s'intéresse depuis 2010 à celles et ceux de sa génération qui sont restés sur place. Faute de diplômes pour trouver du travail ailleurs, mais aussi parce qu'ils y ont trouvé des raisons de s'installer. De cette enquête en immersion, il a tiré un livre passionnant, Ceux qui restent : faire sa vie dans les campagnes en déclin. Renvoyant dos à dos les clichés sur les habitants - la gauche y voit des «beaufs racistes», la droite les représentants d'un «vrai peuple» délaissé - il montre comment la crise économique a recomposé les relations sociales et tissé de nouveaux liens de solidarité et d'entraide. Désormais, la priorité est donnée aux groupes d'amis, de taille assez restreinte, qui maintiennent une cohésion sociale fragile malgré les fermetures d'usines et le départ des services publics.
Voir aussi Somme d'habitudes : un diaporam