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Interview

Pablo Servigne : «Lorsque notre vie est vraiment en jeu, nous la jouons solidaire»

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Selon l’ingénieur agronome, spécialiste de la transition écologique, après la crise du Covid-19, il faudra se doter de nouveaux outils institutionnels qui favorisent les formes d’entraide spontanée, plutôt que l’esprit de compétition qui les caractérise aujourd’hui, à l’image de notre système économique.
Des membres d’une «brigade de solidarité populaire», verbalisés lors d’une distribution de nourriture aux plus démunis, le 1er mai à Montreuil. (Photo Cyril Zannettacci. Vu)
publié le 10 mai 2020 à 17h16

Nous voilà donc presque déconfinés. Mais l'heure n'est pas vraiment à la fête : au lieu de retrouver une joyeuse insouciance, une troublante inquiétude nous guette. Et on se prend à se demander : est-ce le début de la fin ? Alors on lit Comment tout peut s'effondrer (Seuil, 2015), l'essai de Pablo Servigne et de Raphaël Stevens qui a popularisé le concept de «collapsologie», l'étude des effondrements de notre civilisation, et on se mord les doigts en pensant à notre avenir immédiat. Puis on se plonge dans l'Entraide, l'autre loi de la jungle (LLL, 2017), pour lire Pablo Servigne et Gauthier Chapelle expliquer qu'en temps de catastrophes, c'est l'altruisme qui prend le pas sur la compétition. Selon l'agronome qui dirige maintenant la revue Yggdrasil, la compétition est un luxe que l'on ne peut se permettre qu'en temps d'abondance. Et là est le hic : l'abondance est une drogue, et nous en sevrer sera un processus long et douloureux. Mieux vaut partir bien équipé.

Vous avez contribué à populariser les risques d’effondrement grâce à votre livre publié en 2015. La crise sanitaire vous semble-t-elle confirmer l’imminence d’un effondrement de notre monde ?

Le principal message de nos travaux sur les effondrements était surtout de mettre en évidence le risque systémique : c’est l’ensemble du système qui est vulnérable, pas seulement un domaine