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Libération
Un été 1940 (1/7)

16 juin : le grand basculement

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«Libération» retrace  les grandes dates  de l’année qui vit vaciller la France. Aujourd’hui, le jour où, entre négocier et combattre, Pétain et de Gaulle choisissent leur camp.
Lors du Conseil des ministres, le 16 juin 1940. De gauche à droite, Maxime Weygand, Paul Baudouin, Paul Reynaud et le maréchal Pétain. (Photo Keystone France)
publié le 17 juillet 2020 à 17h21

Il est seul, assis dans la pénombre, face à son destin. A la lueur d’une unique lampe, dans le silence de sa chambre, au milieu du décor désuet d’un hôtel bordelais, il écrit. Il vient d’apprendre que le président de la République a nommé Philippe Pétain président du Conseil ; Pétain veut traiter avec Hitler, de Gaulle veut continuer le combat. Le Général sait qu’il n’a rien à faire dans un gouvernement dirigé par le maréchal. Il termine sa lettre, la glisse dans une enveloppe et la fait porter.

Au soir du 16 juin, de Gaulle a décidé de rompre. Non, il n’obéira pas au nouveau pouvoir. Non, il ne se rangera pas à cette prudence déshonorante qui conduit à l’armistice et à la soumission à l’envahisseur. Non, il n’acceptera pas de cesser le combat et passera en Angleterre pour appeler à la lutte au côté de Churchill. Il a passé sa vie dans la discipline militaire ; il se change en rebelle, en fugitif, bientôt en hors-la-loi.

Ainsi s’achève l’une des plus folles journées de l’histoire de France. On célèbre rituellement le 18 juin. Mais le grand basculement a eu lieu le 16, quand le gouvernement français, accablé par le désastre militaire, a cédé aux circonstances. Il s’en est fallu de peu et le sort a hésité jusque tard dans l’après-midi. C’est au terme de rebondissements extraordinaires que «l’étrange défaite», morale autant que politique, s’est imposée.

Les Anglais rembarquent

Le pathétique héros de cette journée est un petit homme à la grande intelligence, l'œil vif et légèrement bridé, le nez pointu, l