Menu
Libération
TRIBUNE

Pour des métropoles démocratiques

Elles sont de plus en plus puissantes de par leur budget et leurs compétences. Pour le maire de Grenoble, Eric Piolle, l’élection du conseil métropolitain et de son président doit se faire au suffrage universel direct.
Bruno Bernard, nouveau président EE-LV de la métropole de Lyon, le 2 juillet. Le conseil métropolitain y est élu au suffrage universel direct. (PHILIPPE DESMAZES/Photo Philippe Desmazes. AFP)
par Éric Piolle, maire Europe Ecologie-les Verts (EE-LV) de Grenoble
publié le 21 juillet 2020 à 16h25

Tribune. Dans son discours de politique générale, le Premier ministre a annoncé vouloir s'appuyer sur les territoires pour redynamiser notre pays, fragilisé par l'épidémie de ­Covid-19, et amplifier les transitions. Chiche  ! Engageons une nouvelle étape de la décentralisation avec l'élection des métropoles au suffrage universel direct, comme c'est le cas pour les régions  ! Logement, mobilités, économie, énergie, culture, agriculture, recherche, etc. : partout sur le territoire, les métropoles sont de plus en plus puissantes. Mais elles restent des naines démocratiques. Exemples  : 28 mai , Gérard Collomb, ex-président de la métropole de Lyon, tente de s'offrir les voix des droites pour faire barrage aux écologistes et à la gauche  ; 17 juillet , Christophe Ferrari, président sortant de Grenoble-Alples-Métropole, s'offre les voix des droites et de l'extrême droite pour faire barrage aux écologistes et à la gauche, grâce auxquels il gouvernait depuis six ans.

Dans les deux cas, un ex-socialiste veut s’allier aux forces de droites pour contrer le succès historique des écologistes et de la gauche aux élections municipales. Dans les deux cas, on assiste au même déshonneur de responsables politiques qui semblent avoir perdu toute boussole politique. Mais les deux cas ont abouti à deux issues radicalement différentes.

A Lyon, Gérard Collomb perd son pari. Les électeurs métropolitains le sanctionnent au second tour et donnent aux listes emmenées par Bruno Bernard une solide majorité à la métropole. A Grenoble, après plus de dix heures de tractations de couloirs, Ferrari remporte son pari. Il devient le premier président de métropole élu par son opposition, contre son ancienne majorité et contre les trois plus grandes villes du département (qui représentent 240  000 habitants sur une métropole de 450  000).

La différence entre les deux métropoles  ? Le suffrage universel. A Lyon, le conseil métropolitain est élu au suffrage universel direct. A Grenoble, comme dans les 20 autres métropoles du pays, les citoyens n’ont pas voix au chapitre, le président est élu par le seul conseil métropolitain, composé de représentants issus des conseils municipaux. La gouvernance métropolitaine est à la merci de jeux d’alliances contre-nature bien loin du ­regard des citoyens.

Le cas grenoblois oblige à rompre avec cet archaïsme démocratique  : depuis l’adoption de la loi Maptam, en 2015, celle qui fonde les métropoles, je demande sans cesse que l’élection du conseil métropolitain et de son président se fasse au suffrage universel. Cette disposition était présente dans le projet de loi porté par le député Olivier Dussopt (à l’époque encore socialiste), mais retirée sous la pression de la majorité LR au Sénat. Cette disposition figurait aussi dans le projet du candidat Macron en 2017, elle est repoussée aux calendes grecques depuis. En donnant à chaque territoire ses représentants dédiés et un mandat clair au président et son équipe, des élections métropolitaines déconnectées des municipales, sur le modèle des régionales, permettraient de présenter clairement les enjeux métropolitains aux citoyens, qui pourraient choisir en conscience dans les urnes. Pour rappel, le mode de scrutin des ­régionales est né au lendemain de ­l’infamie Millon, en 1998, qui s’était fait élire avec les voix du FN. Les citoyen·ne·s manifestent, dans la rue et dans les urnes, un désir d’amplifier radicalement les transitions écologiques et sociales. L’accord de Paris fait des territoires des acteurs essentiels et stratégiques des transitions. Pour y répondre, il faut redonner aux citoyens une place centrale, faire écho aux voix que l’on n’entend jamais, permettre un exercice du pouvoir qui allie clarté et respect du pluralisme. Cette réforme reçoit l’approbation de toutes et tous. Etendons le mode de scrutin des élections régionales à l’ensemble des métropoles du pays  !