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Myriam Benraad : «Nous sommes entrés dans un régime de colère universel»

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Pour la politologue, longtemps spécialiste du Moyen-Orient, la colère qui avait éclaté durant les printemps arabes s’est aujourd’hui répandue sur tous les continents. De l’Asie à l’Amérique latine, des pays démocratiques aux régimes répressifs, slogans et manifestation convergent pour réclamer plus de dignité et de justice sociale.
Manifestation de gilets jaunes, à Paris, le 12 septembre. (Cyril ZANNETTACCI/Photo Cyril Zannettacci. Vu pour Libération)
publié le 6 octobre 2020 à 18h06

Partout dans le monde des peuples en colère manifestent. La colère semble être devenue globale. Louée pendant l'Antiquité, elle a été refoulée pendant de très longs siècles dans l'Occident chrétien où elle était considérée comme péché. Elle réapparaît aujourd'hui dans nos sociétés qui pensaient être définitivement pacifiées. C'est pour cette raison qu'elle est aussi désarmante. Mais on ne peut la nier car elle s'insinue dans les rapports interpersonnels et jusque dans les relations internationales. Dans Géopolitique de la colère, de la mondialisation heureuse au grand courroux (éditions du Cavalier bleu), la politologue Myriam Benraad retrace une histoire de cette émotion et les ressorts de son émergence en ce début de siècle.

En quoi peut-on parler de globalisation de la colère ?

J’ai commencé à écrire cet ouvrage en 2019 alors que partout dans le monde des peuples manifestaient dans les rues de Santiago, de Beyrouth, de Hongkong ou encore d’Alger. La globalisation de la colère était manifeste car, malgré les diversités culturelles, les slogans convergeaient tous : les manifestants en Asie comme en Amérique latine ou dans le monde arabe demandaient plus de démocratie, de justice sociale. Ces revendications économiques et sociales dans les pays démocratiques ou d’exigence du respect des droits fondamentaux dans les régimes répressifs, accompagnaient aussi un mouvement féministe de fond, dans le sillage de MeToo. Les deux phénomènes sont liés car partout, les femmes étaient très présentes dans les manifestations sociales