La forte militarisation des Etats-Unis a longtemps été négligée par les chercheu·rs·ses en sciences sociales, en dépit de la guerre permanente que connaît ce pays depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans son livre The Rise of the Military Welfare State (2015), l'historienne américaine Jennifer Mittelstadt met à jour l'existence d'un «Etat-providence militaire» dans un pays où la protection sociale «à l'européenne» est faible. Avec 2 millions de soldats et 18 millions d'anciens combattants, l'institution, explique-t-elle, est un enjeu politique majeur et ses rapports se sont tendus avec le président Trump, tout au long du mandat. Le renouvellement social et ethnique de l'armée depuis une dizaine d'années pourrait à terme transformer le monde conservateur et ses pratiques électorales.
Soldats et anciens combattants sont-ils un enjeu politique important pour la campagne présidentielle qui s’achève ?
Ils le sont, et la présidence de Trump a été celle qui a le plus politisé le fait militaire. Donald Trump a au départ choyé les soldats en promettant de «restaurer l'armée» et en parlant de «ses» généraux. Mais la lune de miel a été courte. Les chefs militaires n'ont pas compris son changement de stratégie en Afghanistan et en Corée du Nord, tout comme son rejet de la décision de 2016 autorisant les personnes transgenres dans l'armée. Quand j'enseignais à l'Army War College en 2017, beaucoup d'étudiants et de collègues s'inquiétaient de la lenteur des nominations aux postes stratégiques et craignaient un chaos pour la sécurité nationale. Ajoutons à cela la grâce