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Blog «Coulisses de Bruxelles»

L'Union au secours des LGTB+

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Des membres du Parlement européen à Bruxelles manifestent leur soutien à la communauté LGBT+ polonaise, le 15 septembre. Photo John Thys. AFPLe divorce entre la «vieille» et la «nouvelle» Europe, pour reprendre la célèbre classification de l’administration George W. Bush, est désormais patent. Il paraît loin, très loin, le temps de «la fin de l’histoire», du triomphe de la démocratie sur l’hydre communiste, de la «réunification» du continent européen. Si l’adhésion à l’Union a incontestablement
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publié le 18 novembre 2020 à 17h44
Des membres du Parlement européen à Bruxelles manifestent leur soutien à la communauté LGBT+ polonaise, le 15 septembre.
Photo John Thys. AFP

Le divorce entre la «vieille» et la «nouvelle» Europe, pour reprendre la célèbre classification de l’administration George W. Bush, est désormais patent. Il paraît loin, très loin, le temps de «la fin de l’histoire», du triomphe de la démocratie sur l’hydre communiste, de la «réunification» du continent européen. Si l’adhésion à l’Union a incontestablement permis de stabiliser les anciennes démocraties populaires et républiques soviétiques et de leur offrir un rattrapage économique rapide, il semble jour après jour qu’elle est un échec sur le plan des valeurs.

La démocratie libérale est un modèle contesté par la Pologne et la Hongrie, les droits des femmes sont fragilisés ou bafoués dans nombre de pays de l'Est, les minorités ethniques, sexuelles ou religieuses sont discriminées dès qu'on franchit la ligne Oder-Neisse…

Avortement et changement de sexe

Ainsi, après la Pologne qui a tenté de réduire à rien le droit à l'avortement, c'est la Hongrie qui vient de proposer d'inscrire dans sa constitution l'interdiction de changer de sexe. Ou encore, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie, la Bulgarie, la Roumanie et la Croatie qui définissent le mariage comme une union entre un homme et une femme (mais l'union civile est ouverte aux homosexuels en Croatie et en Hongrie). Plus préoccupant, les discriminations ouvertes voire les violences contre les LGBT+ (lesbiennes, gays, bis, trans, mais aussi les personnes non binaires, intersexuées et queer) sont légion à l'Est et peu poursuivies. (1)

Après avoir longtemps regardé ailleurs, en espérant que la situation se normaliserait au fur et à mesure de leur développement économique, l’Europe de l’Ouest a décidé de s’attaquer à ces dérives qui menacent le fondement même du projet communautaire qui ne peut se résumer en une simple union de transfert des riches vers les pauvres : il faut un donnant-donnant, sinon les opinions publiques de l’ouest refuseront de continuer de leur verser de l’argent.

Etranglement

Le Parlement européen et l'Allemagne, qui exerce la présidence semestrielle de l'Union, viennent ainsi de se mettre d'accord pour établir un lien entre le respect de l'État de droit et le versement des subventions européennes. Mais attention : c'est seulement si la violation de l'Etat de droit (par exemple la fin de l'indépendance de la justice ou l'absence de lutte contre la corruption) compromet la bonne utilisation des fonds que ce mécanisme pourra être activé et pas si la Pologne décide de supprimer le droit à l'avortement. Budapest et Varsovie se sont malgré tout étranglés et menacent de poser leur véto au budget européen et au fonds de relance.

«Droit d’être en famille»

Le 12 novembre, la Commission a proposé d'aller encore plus loin en mettant sur la table sa première «stratégie en faveur de l'égalité des personnes LGTBQI». Pour elle, c'est le moment : l'opinion publique européenne est de plus en plus favorable à une égalité des droits (à 76%). La Commission annonce qu'elle va proposer une série de mesures allant de la pénalisation des crimes de haine et de discours haineux à l'égard des LGTBQI à la reconnaissance mutuelle de la parentalité légalement acquise dans un autre Etat membre, en passant par l'intégration la lutte contre les discriminations dans toutes les politiques de l'Union ou en donnant davantage de pouvoirs aux organismes nationaux chargés de l'égalité de traitement…

Une véritable déclaration de guerre aux gouvernements de l’Est qui prétendent défendre la «civilisation chrétienne». Mais son principal héraut, le Pape François, vient de reconnaître, le mois dernier, que «les personnes homosexuelles ont le droit d’être en famille» ce qui implique d’adopter «une loi d’union civile, pour qu’elles soient légalement protégées».

N.B.: article publié le 16 novembre