Alors que Bruxelles est en zone rouge, comme toute l'Europe, et que les voyages «non essentiels» sont déconseillés par les autorités belges, quelques dizaines de milliers d'eurocrates se préparent à rentrer chez eux pour les vacances de Noël. Or, nonobstant le respect des mesures sanitaires, les institutions communautaires font tout pour faciliter ces retours au risque d'exporter le coronavirus ou de le réimporter en Belgique…
Enseignement à distance
Ainsi, dans un courrier daté du 20 novembre, Gertrud Ingestad, la directrice générale de la Commission chargée des ressources humaines annonce qu’elle a décidé d’étendre la période autorisée de télétravail à partir de l’étranger à compter du 10 décembre (au lieu du 17 initialement prévu) afin de permettre à certains eurocrates de respecter une période de quarantaine de quatorze jours exigée à l’entrée de quelques pays.
Dans le même temps, les quatre écoles européennes de Bruxelles (financées à hauteur de 60% par le budget européen), qui permettent à 12 000 enfants de fonctionnaires de recevoir un enseignement dans leur langue d’origine, ont décidé de basculer la totalité des classes, du cours préparatoire à la terminale, en enseignement à distance les 21 et 22 décembre (donc départ possible le 18 décembre), puis du 7 au 18 janvier «afin de pouvoir respecter la période de quarantaine de dix jours» imposée par la loi belge au retour d’une zone orange ou rouge… Une quarantaine dont personne ne surveille le respect effectif, précisons-le, ce qui permettra tous les abus. L’objectif est clairement affiché : permettre aux familles de rentrer chez elles.
Le problème est que ces dispositions vont à l’encontre des recommandations des autorités belges que les institutions communautaires prétendent pourtant respecter en toutes circonstances. Ainsi, alors que les vacances de la Toussaint ont commencé dans les écoles européennes une semaine avant les congés belges, celles-ci ont décidé de rester fermées une semaine de plus en novembre afin de s’aligner sur la décision locale. Comme l’écrivait aux parents l’une des directrices d’une école européenne, Micheline Sciberras, le 23 octobre, «il est crucial que nous suivions tous les mesures annoncées par les autorités belges et que nous suivions tous les conseils en matière de voyage. De nombreux pays imposent de sérieuses restrictions aux voyages et celles-ci doivent également être respectées». Or, pour Noël, la Belgique n’a nullement prévu de fermer ses écoles ou de basculer en enseignement à distance afin de limiter les voyages à l’étranger, ce qui n’empêche pourtant pas les écoles européennes d’innover.
«Voyages déconseillés»
Une décision d'autant plus surprenante que le Premier ministre belge, Alexander De Croo, vient de solennellement mettre en garde ses compatriotes : «Les voyages sont fortement déconseillés en Europe. […] Ne faisons pas de plans maintenant par lesquels nous nous mettrions mutuellement en danger.» Cette incohérence totale met en rage certains parents qui ont le sentiment que les vacances des fonctionnaires passent avant l'intérêt des enfants qui accumulent les retards depuis le premier confinement. Par exemple, on sait qu'il est quasiment impossible d'apprendre à lire et à écrire via un écran, ce qui explique pourquoi les écoles n'ont pas été fermées lors du second confinement. Pour ne rien arranger, certains professeurs refusent depuis la rentrée de se rendre en cours en invoquant leur peur du coronavirus qui a décidément bon dos. En tous les cas, cet article, publié le 23 novembre,n'a pas plu à un syndicat d'eurocrates, U4U, syndicat qui m'a déjà violemment attaqué lors de l'affaire Martin Selmayr qu'il a défendu jusqu'au bout.