INTOX - A l'approche des élections régionales, le parti Les Républicains fait dans le recyclage d'intox. Dans la foulée de NKM qui attaquait Anne Hidalgo en janvier, Geoffroy Didier a décidé de tacler l'équipe de Jean-Paul Huchon au sujet de la pollution de l'air en région parisienne. Invité sur le plateau des Echos, le conseiller régional d'opposition ne fait pas dans la nuance : «Cela fait dix-sept ans que la majorité socialiste, communiste et écologique gouverne la région Ile-de-France… Et pourtant, la région n'a jamais été aussi polluée. Et nous atteignons aujourd'hui des niveaux records de pollution, avec un seuil de pollution atteint plus de trente jours par an.»
C'est au tout début de l'interview :
DÉSINTOX - L'air que respirent les Franciliens serait donc beaucoup plus pollué qu'il y a dix-sept ans, à cause de la passivité politique de la région ?
Certes, comme le rappelle Airparif (l'association qui évalue la qualité de l'air en Ile-de-France), neuf parisiens sur dix et trois millions de Franciliens sont toujours exposés à des seuils de dioxyde d'azote supérieurs à la règlementation, comme l'a montré une étude publiée en juillet 2013 par l'organisme. Les malchanceux qui habitent à proximité des grands axes de circulation sont logiquement les plus touchés au quotidien.
En revanche, Geoffroy Didier exagère largement quand il parle d'un seuil d'alerte atteint trente jours par an. Depuis début 2015, Airparif a constaté quinze jours de dépassement concernant le niveau d'au moins un des quatre polluants dans l'air abalysés (particules fines, dioxyde d'azote, ozone et dioxyde de souffre). Sur ces quinze, quatre seulement relevaient d'un seuil «d'alerte», le reste étant considéré comme relevant d'un seuil «d'information», celui où les pouvoirs publics doivent émettre des recommandations. En 2014, une pollution de l'air élevée a été signalée sur seize journées, mais dont quatre seulement relevaient du seuil d'alerte.
«Seuils de déclenchements abaissés»
«Si certains ont l'impression qu'il y a une augmentation des épisodes de pollution, c'est notamment par ce que les seuils de déclenchements ont été abaissés en septembre 2011 en raison d'un arrêté ministériel [du 26 mars 2011, ndlr]», explique Amélie Fritz, ingénieure à Airparif. «On est donc obligé d'émettre un message d'information ou d'alerte à partir d'un seuil d'émission de particules fines ou de dioxyde d'azote plus faible qu'auparavant, alors que globalement la pollution de l'air s'est amélioré.»
Et oui, contrairement à ce que lance Geoffroy Didier, la région n'affiche pas non plus un «niveau record de pollution». L'étude d'Airparif a montré qu'entre 2002 et 2012, les émissions des quatre polluants étudiés ont globalement diminué, surtout celles de particules fines et des oxydes d'azote (-30 % en dix ans). Une amélioration que l'association attribue notamment aux travaux d'aménagements de voirie et la modernisation du parc automobile (contrebalancée toutefois par l'augmentation de véhicules roulant au diesel).
Comme nous l'avions montré dans un précédent Désintox, d'une année à l'autre, les conditions météorologiques peuvent influer sur les variation d'émissions de polluants. Mais en mai 2015, Airparif confirmait cette tendance à l'amélioration générale, avec une baisse des émissions de particules et une légère baisse des émissions de dioxyde d'azote (émis pricipalement par la circulation routière) sur ces quinze dernières années. Seul les niveaux d'ozone seraient en légère augmentation.
Si Geoffroy Didier a donc raison de se préoccuper de la qualité de l'air en Ile-de-France, parler d'une dégradation importante, et, a fortiori, l'attribuer aux décisions de la gauche, est nettement moins à propos.