Les banques internationales ont du mal à passer au vert. Un consortium de huit ONG, dont Reclaim France, révèle dans son rapport «Banking on climate chaos» publié ce mardi 17 juin que les 65 plus grosses banques mondiales ont accordé 750 milliards d’euros de financement aux entreprises du pétrole, du gaz et du charbon en 2024, contre 612 milliards d’euros en 2023, soit une hausse de plus de 22 % en un an. Ces investissements avaient pourtant connu une décrue depuis 2021 – ils atteignaient alors 797 milliards d’euros. La moitié des financements est consacrée à l’expansion des énergies fossiles et le haut du classement est principalement occupé par des banques américaines et japonaises.
Parmi celles-ci, figure le plus grand établissement bancaire des Etats-Unis, JP Morgan. Premier soutien financier des énergies fossiles, l’entreprise dirigée par Jamie Dimon a investi 46,24 milliards d’euros en 2024, précise le rapport. Soit 39 % de plus que l’année précédente. Depuis 2021, elle a contribué à hauteur de 166,2 milliards d’euros. Un podium complété par Bank of America (39,8 milliards d’euros en 2024) et Citigroup (38,6 milliards d’euros). Ces hausses s’expliquent notamment par la stratégie pro-énergie fossile défendue par Donald Trump, incarnée par son slogan : «Drill, baby, drill» («Fore, chéri, fore»). L’étude incrimine également «la baisse des taux d’intérêt en 2024, faisant baisser le coût des emprunts, et un contexte général propice au désengagement climatique».
BPCE «tourne le dos à la science et au climat»
Le japonais Mizuho Financial (34,8 milliards d’euros de financement) arrive en quatrième position. En France, les six grandes banques – BNP Paribas, le Crédit agricole, la Société générale, BPCE (regroupant la Caisse d’épargne, Natixis et la Banque populaire), le Crédit mutuel et la Banque postale – ont contribué à hauteur d’environ 17,3 milliards d’euros, soit moitié moins qu’en 2023. Le rapport souligne d’ailleurs un retrait progressif de la majorité de ces établissements depuis 2020. Une exception : l’étude pointe «une augmentation particulièrement marquante des financements de BPCE». Le groupe enregistre une hausse «particulièrement préoccupante», car «tirée par des financements à la partie la plus injustifiable de l’expansion fossile : le développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers». Dans ce secteur, le groupe BPCE a augmenté ses financements de 133 % entre 2023 et 2024.
La directrice de l’ONG Reclaim Finance, Lucie Pinson, estime que ce mauvais élève «persiste à tourner le dos à la science et au climat, aggravant son retard sur les autres banques françaises et contribuant à l’expansion la plus injustifiable des énergies fossiles», et va «à contresens de ses propres engagements». Selon elle, «c’est à toute la chaîne des énergies fossiles qu’il faut s’attaquer» et «les banques doivent de toute urgence cesser de financer l’expansion pétro-gazière et privilégier des financements aux énergies soutenables pour la production d’électricité.»
BPCE a réagi par une déclaration transmise à l’Agence France-Presse, assurant que les données collectées «ne reflètent en rien la réalité» et mettant en avant ses «engagements volontaires» en matière de décarbonation. Depuis l’entrée en vigueur de l’accord de Paris sur le climat en 2016, plus de 6 850 milliards d’euros ont été consacrés par les banques aux entreprises du pétrole, du gaz et du charbon, calculent les ONG. Des sommes bien éloignées des exigences écologiques.