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Libération
Coup de pompe

Aide de 100 euros pour les carburants : le déjà-vu d’Emmanuel Macron

Alors que le gouvernement avait remisé toute nouvelle aide à l’achat d’essence ou de diesel, le chef de l’Etat s’est a priori résigné à ressortir pour 2024 l’aide aux «travailleurs» modestes déjà en vigueur en 2023. 5 millions de foyers devraient pouvoir y prétendre.
En annonçant cette nouvelle aide, le président de la République acte l'idée que la vente à perte a fait long feu. (Arnaud Bertand/ABACA)
publié le 25 septembre 2023 à 7h49

A trois jours de la présentation du projet de loi de finances 2024 en Conseil des ministres et alors que le prix de l’essence, le sans-plomb comme le gazole, tutoie les 2 euros le litre, le président de la République a donc annoncé une nouvelle mesure lors de son interview dimanche soir sur TF1 et France 2. «Une aide de 100 euros par voiture et par an», a déclaré Emmanuel Macron, «limitée aux travailleurs» qui «ont besoin de rouler» pour les «cinq premiers déciles», soit 50% des personnes les plus modestes. Pour les détails, il faudra attendre…

Cette mesure ressemble à s’y méprendre à celle que le gouvernement avait retenue en fin d’année dernière pour, déjà, faire face à la hausse des prix à la pompe. Cette indemnité carburant de 100 euros, attribuée sous condition de revenu, d’activité – ce qui exclut les retraités – et de détention de véhicule, n’était pas versée automatiquement, mais devait être sollicitée. Sur les 10 millions de personnes recensées éligibles à l’époque, 4,3 millions – soit moins de la moitié – en ont fait la demande début 2023 sur le site des impôts. Il fallait fournir une attestation sur l’honneur indiquant qu’on utilise son véhicule pour aller travailler, son numéro fiscal, sa plaque d’immatriculation et son numéro de carte grise. Le dispositif n’avait donc pas coûté 1 milliard d’euros à l’Etat comme prévu, mais 430 millions.

500 millions d’euros de budget

Cette année, Bercy a revu ses calculs et estime que seulement 5 millions de foyers sont potentiellement concernés. «Les 10 millions de foyers, c’était les foyers théoriquement éligibles sur la base des seuls critères d’activité et de revenus. Or il y avait un troisième critère cumulatif : la possession d’un véhicule que nous ne connaissions pas, explique-t-on au cabinet de Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie et des Finances. Maintenant nous avons une plus grande visibilité et nous pouvons estimer (sur la base des versements du début d’année) que cette mesure est destinée à environ 5 millions de foyers.» Autour de 500 millions d’euros de dépenses devraient donc être budgétés.

Cette mesure ciblée, qui revient à une aide 20 centimes par litre pendant six mois pour un automobiliste moyen selon Bercy, avait été beaucoup moins onéreuse que les 8 milliards d’euros de la ristourne carburants adoptée en 2022 par l’exécutif. Cette subvention aux énergies fossiles, aux antipodes des engagements climatiques, avait également largement profité aux plus aisés, comme l’Insee l’a démontré dans une étude. Pour les 25% les plus aisés, les ristournes avaient allégé la facture de 64 à 115 euros, pour le quart des ménages les plus modestes, de 29 à 48 euros.

Dans la même interview télévisée, Emmanuel Macron a exclu toute modification des taxes, comme le réclamaient certains élus y compris au sein de la majorité, plaidant pour des «réponses concrètes, pragmatiques et pas démagos». Il a, par ailleurs, tiré les leçons du feuilleton de la semaine dernière sur l’idée du gouvernement d’autoriser la vente à perte de carburants, rejetée en bloc par les distributeurs. Si la «menace» est brandie, ce projet est abandonné. Le chef de l’Etat leur demande désormais de vendre à prix coûtant – ce que certaines enseignes font déjà lors d’opérations promotionnelles temporaires.