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Libération
Revirement

Après l’évolution des droits de douane annoncée par Trump, les constructeurs automobiles dans le brouillard

Plusieurs grands groupes, dont le français Stellantis, ont annoncé ce mercredi 30 avril suspendre leurs prévisions pour cette année en raison de l’incertitude créée par la politique commerciale du président américain.
Dans l'usine Stellantis de Sochaux, le 3 octobre 2024. (Frederick Florin/AFP)
publié le 30 avril 2025 à 20h05

Le «petit cadeau» fait par Donald Trump aux constructeurs automobiles mardi 29 avril, le soir des 100 jours de son investiture, ne les a pas franchement rassurés. Le président américain a signé un décret pour que les constructeurs ne cumulent pas toutes les taxes douanières rehaussées depuis un mois, une mesure rétroactive au 3 avril. Il avait décidé ce jour-là que les automobiles importées seraient taxées à 25 % et relevé les droits de douane sur l’acier et l’aluminium à 25 % et il s’apprêterait, selon ses dires le mois dernier, à taxer les pièces détachées le 3 mai au plus tard. Seul le montant des droits de douane le plus élevé serait concerné.

Cette annonce, qui conduit à un allègement relatif de la facture douanière, a été saluée par Matt Blutt, le président de l’Association des constructeurs américains - qui représente les trois constructeurs historiques Ford, GM et Stellantis : «Appliquer de multiples droits de douane sur le même produit ou la même pièce détachée représentait une inquiétude importante pour les constructeurs américains et nous sommes ravis que cela ait été traité.»

Néanmoins, au lendemain de cet énième revirement, deux constructeurs, le français Stellantis et l’allemand Mercedes Benz ont annoncé, lors de la présentation de leurs résultats du premier trimestre, qu’ils suspendaient leurs prévisions pour cette année. Le premier groupe a invoqué deux raisons : «l’évolution des tarifs douaniers» et «la difficulté à en prévoir les impacts potentiels sur le marché et le paysage concurrentiel». Son directeur financier, Doug Ostermann, lors d’une conférence avec les analystes, a expliqué qu’à «court terme, c’est très perturbant et ça a créé beaucoup d’incertitude», tout en assurant : «On croit profondément que l’intention du gouvernement américain est de renforcer l’industrie américaine.» Le deuxième groupe (dont le bénéfice net a plongé de 43 % au premier trimestre) a averti, dans un communiqué, que l’incertitude liée aux politiques commerciales et à leurs effets sur la demande rendait «toute prévision fiable impossible pour le reste de l’année».

Chiffres mauvais pour Stellantis

Le constructeur français, qui n’a toujours pas nommé de directeur général pour remplacer Carlos Tavares parti en décembre, est l’un des constructeurs européens les plus affectés par le relèvement des droits de douane. Avec ses marques Jeep, Ram, Peugeot, Fiat, il produit en dehors des Etats-Unis (au Mexique, au Canada) deux cinquièmes des voitures qu’il y vend. S’il a annoncé qu’il augmenterait sa production américaine, il avait dû un temps mettre en pause certaines usines pour s’adapter au nouveau coût des pièces lié aux droits de douane et au ralentissement annoncé du marché américain. Une fois que la politique américaine sera fixée, le groupe pourra «revoir toute sa chaîne d’approvisionnement», a ajouté Doug Ostermann.

En difficulté depuis 2024, le groupe a vu son chiffre d’affaires baisser de 14 % sur un an au premier trimestre 2025, à 35,8 milliards d’euros. Le recul du chiffre d’affaires est notamment lié à une baisse des ventes de 9 %. Si ses chiffres sont mauvais au premier trimestre, Stellantis souligne que les premiers progrès de son offensive de redressement commercial se voient déjà et devraient accélérer au deuxième trimestre. Aux Etats-Unis, le groupe considère aussi que les droits de douane pourraient lui donner un avantage compétitif sur des concurrents produisant davantage à l’étranger, et donc plus touchés par ces taxes.