La chute des recettes commence à se sentir. Pour la première fois depuis le début de l’invasion en Ukraine, la Russie a prévu une baisse des dépenses militaires pour l’année prochaine, rapporte l’agence Reuters. Un choix contraint par une baisse des recettes, provoquée en particulier par la chute de la valeur des exportations de ressources fossiles : pétrole, gaz et charbon. Celles-ci atteignaient en moyenne au cours des trois premières semaines de septembre, 545 millions d’euros par jour, soit une baisse de plus de la moitié par rapport à leur pic d’avril 2022.
Les exportations d’hydrocarbures sont essentielles au budget de l’Etat russe, et comptaient en 2024 pour environ un tiers des recettes. Côté dépenses, c’est le domaine militaire qui compte pour un tiers en 2024, un record en Russie post-soviétique. Ces dépenses avaient été largement financées, durant les premières années de l’invasion, par un trésor de guerre que Poutine avait accumulé avant 2022. Ce magot a été largement entamé, la Russie ayant accumulé depuis déficit sur déficit. Pour trouver de nouvelles ressources, le ministère russe des Finances a proposé la semaine dernière un relèvement de 2 points du taux de TVA, ce qui devrait encore entamer le pouvoir d’achat des Russes, dans un contexte de forte inflation. Cette hausse de la TVA s’ajoute à près de 30 milliards de dollars d’actifs confisqués à des oligarques par l’Etat russe depuis 2022, sans compter une ponction de 106 milliards de dollars et 171 tonnes d’or au fonds souverain russe pour financer la guerre et le déficit.
Drones et des missiles ciblent les installations pétrolières
Des mesures mises en œuvre pour tenter de compenser la chute des prix du gaz et du pétrole après leur pic de 2022. Les pays importateurs ont diversifié leurs sources d’approvisionnement en gaz, les pays du Golfe ont augmenté leurs exportations de pétrole, ce qui a contribué à faire baisser les prix. Et peu à peu, des sanctions économiques se sont mises à viser la Russie, allant de la mise en place de plafonds sur les prix à des sanctions visant les pétroliers. La baisse des revenus russes a continué en 2025, principalement dans le domaine du pétrole raffiné. Une partie du pétrole puisé en Russie passe par une étape de raffinage avant d’être exporté. Sous forme de carburant, diesel ou kérosène notamment, ou de lubrifiant pour moteurs. La valeur quotidienne des exportations de ces produits atteint début septembre 133 millions d’euros, soit leur niveau le plus bas depuis le début de la guerre, à moins d’un tiers de leur record de mars 2022.
Le bombardement des raffineries et autres installations pétrolières par l’Ukraine n’est probablement pas étranger à cette chute. A l’aide de drones et de missiles, le pays cible, particulièrement depuis 2025, les installations pétrolières russes. Selon l’agence Reuters, les forces ukrainiennes seraient parvenues à diminuer de 20 % les capacités de raffinage russe. Et continuent à intensifier leurs frappes. Résultat, des régions russes font face à des pénuries de carburant, contre lesquelles le gouvernement russe vient de décider un embargo partiel sur les exportations de diesel et d’essence. Les revenus d’exportations russes n’ont probablement pas fini de chuter. De quoi compliquer le financement de l’invasion de l’Ukraine.
L’Europe encore dépendante du gaz russe
En 2022, le principal client acheteur de ressources fossiles russes était l’Europe, qui importait de quantités massives de gaz et de pétrole, dans un contexte de prix très élevé. Depuis 2023, ce n’est plus le cas et l’Union européenne se retrouve en quatrième place derrière la Chine, l’Inde et la Turquie. Depuis le début de la guerre, la Chine a acheté pour 275 milliards d’euros de ressources fossiles à la Russie, l’Europe 214 milliards et l’Inde 152 milliards.
Des mesures ont été prises pour que l’Europe limite ses importations, aussi n’achète-t-elle plus que du gaz, sous forme liquéfiée et livrée par bateau. A l’exception de la Hongrie et de la Slovaquie, qui continuent à se faire livrer du pétrole par pipeline et du gaz par gazoduc, en bénéficiant d’une exemption européenne à ce sujet. L’Ukraine est cependant parvenue à ralentir les livraisons en attaquant les installations russes ces derniers mois.
La France était quant à elle le premier acheteur européen de gaz liquéfié russe, avec des importations s’élevant à environ 150 millions d’euros en août dernier. Mais une partie de cette ressource est ensuite réexportée vers les pays voisins, notamment l’Allemagne.