Pas sûr que les factures d’électricité baissent autant qu’escompté, la faute à l’état des finances publiques. Le ministère du Budget et des Comptes publics a confirmé ce dimanche 6 octobre des informations du journal Le Parisien selon lesquelles le gouvernement envisagerait d’augmenter une taxe au-delà du niveau d’avant la crise énergétique. Selon le journal, «Bercy travaille à une augmentation de la Taxe intérieure de consommation finale sur l’électricité (TICFE) au-delà des 32,44 euros par mégawattheure, qui était le niveau de taxation d’avant la crise inflationniste».
Le ministère a reconnu auprès de l’AFP que cette hypothèse était à l’étude : «Il est envisagé d’aller plus loin mais pour l’instant il n’y a rien de définitif, ce sera soumis au débat parlementaire».
Décryptage
Le gouvernement précédent a organisé la fin progressive du bouclier tarifaire - qui coûte très cher à l’État, évalué à 110 milliards d’euros de 2021 à 2023. L’exécutif de Gabriel Attal a ainsi remonté le montant de la TICFE en février, de 1 euro à 21 euros par Mégawatt-heures (MWh), et comptait la porter à 32,44 euros par MWh en février 2025, soit son niveau d’avant la flambée de l’inflation, alors que cette taxe avait été abaissée au minimum pour soulager les factures des Français pendant la crise énergétique. La remonter à 32,44 MWh devait permettre à l’État de récupérer 5 milliards d’euros.
Des particuliers aux entreprises, tout le monde est concerné par la hausse de la TICFE : les abonnés au tarif réglementé d’EDF (le tarif dit bleu, le tarif heures pleines /heures creuses, ou l’offre Tempo), soit plus de 20 millions de clients, mais aussi les particuliers et professionnels qui ont souscrit une offre de marché à prix fixe ou variable chez un fournisseur alternatif.
«Double peine»
La ministre de la Transition écologique et de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, a elle-même mis en garde ce dimanche contre «le risque» d’aller trop loin dans l’augmentation de cette taxe. La baisse des prix sur le marché international «permet de remettre la taxe que payaient les Français avant la crise de l’énergie au niveau d’avant-crise», soit à 32 euros MWh contre 22 actuellement, a déclaré la ministre sur France 3. «Simplement, il ne faut pas aller au-delà», a-t-elle lancé. Sous peine notamment de lester la facture de certains Français modestes non soumis au tarif réglementé de l’électricité.
Agnès Pannier-Runacher a appelé à être «très vigilant». «Si on va au-delà [des 32 MWh], le risque, c’est qu’effectivement il y ait une augmentation de prix de l’électricité. Il faut être très vigilant parce que les Français modestes et les classes moyennes […] auront la double peine. Ce sont souvent elles qui vivent dans des passoires thermiques», selon la ministre.
J’entends ici et là des spéculations sur la fiscalité de l’électricité.
— Agnès Pannier-Runacher 🇫🇷🇪🇺 (@AgnesRunacher) October 6, 2024
Je veux être claire aujourd’hui : ce n’est pas arrêté, et c’est le Parlement qui aura le dernier mot sur le budget présenté par le gouvernement.
Je serai vigilante : s’il est normal de sortir… pic.twitter.com/AMXCTZBTFs
Malgré la fin du bouclier tarifaire, les Français au tarif réglementé devraient néanmoins s’attendre à une baisse d’au moins 10 % de leurs factures à cette même échéance, avait fait savoir en septembre la Commission de régulation de l’énergie.
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, est allée dans ce sens ce dimanche midi : «La baisse des prix de marché viendra plus que compenser l’augmentation de cette taxe. On sera autour de 10 % [de baisse] pour les 80 % de Français qui sont au tarif réglementé de l’électricité», au micro de l’émission Questions politiques.
"80 % des Français verront leur facture [d'énergie] baisser", assure @MaudBregeon. Pour les autres, "ce n'est pas une hausse par rapport à ce qu'on connaissait avant, c'est un retour à la normale". #QuestionsPol pic.twitter.com/EWIYvKi1RK
— France Inter (@franceinter) October 6, 2024
Mais si la taxe grimpe au-delà des 32 euros par MWh, les conséquences pourraient être différentes. Le cas échéant, «malgré la hausse de cette taxe, il y aura toujours une baisse des prix prévue à hauteur de 9 % en février 2025, soit environ 110 euros de moins en moyenne sur la facture annuelle, pour les 80 % de foyers sous tarifs réglementés» de l’électricité, a assuré le ministère à l’AFP, sans chiffrer l’impact attendu pour les recettes de l’État d’un tel relèvement de la taxe.
Dans le cadre des tarifs réglementés, le prix est fixé par les pouvoirs publics, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). «Les 20 % (de clients) qui ont des tarifs non réglementés peuvent tout à fait basculer vers des tarifs réglementés», a souligné auprès de l’Agence France Presse le ministère de l’Economie.