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Dépenses publiques

Budget 2026 : qu’est-ce qu’une «année blanche», la piste d’économies envisagée par François Bayrou ?

Le Premier ministre doit présenter les orientations budgétaires 2026 mardi 15 juillet. Pour réduire le déficit, l’une des hypothèses consisterait à reconduire à l’identique certaines dépenses entre 2025 et 2026.
Pour économiser 40 milliards d’euros sur le budget 2026, François Bayrou pourrait annoncer mardi 15 juillet la mise en place d’une «année blanche». (Xose Bouzas/Hans Lucas. AFP)
publié le 13 juillet 2025 à 16h33

L’hypothèse revient avec insistance. Pour économiser 40 milliards d’euros sur le budget 2026, François Bayrou pourrait annoncer mardi 15 juillet la mise en place d’une «année blanche». Avec ce système, en 2026, tout ou partie des dépenses publiques serait plafonné à leur niveau de 2025, sans prise en compte de l’inflation, ce qui conduirait mécaniquement à des économies.

Habituellement, certaines dépenses comme les allocations adultes handicapées ou les pensions de retraite de régime général sont automatiquement réévaluées d’une année sur l’autre afin de tenir compte de la hausse des prix. Si l’option du gel des dépenses était privilégiée, en 2026, des prestations sociales comme la prime d’activité ou le RSA pourraient conserver leur niveau de 2025. Mais les contours de cette «année blanche» sont encore flous. Dans une version partielle, elle ne concernerait qu’une partie des dépenses de l’Etat et de la Sécurité sociale ; dans sa forme maximaliste, c’est l’ensemble des dépenses publiques qui seraient reconduites sans augmentation, des prestations sociales aux crédits des ministères en passant par les dotations aux collectivités, entre bien d’autres. Selon l’Institut national de la statistique, sur les 1 670 milliards d’euros de dépenses publiques en 2024, entre 400 et 500 milliards ont été indexées sur l’inflation.

Augmentation déguisée des impôts

Des déclarations publiques de membres du gouvernement ont nourri l’hypothèse de cette année blanche. «Je pense qu’il y aura une pause sur certaines dépenses», déclarait début juillet la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, dans le Figaro. C’est «une piste sur la table», a confirmé le ministre du Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin, sur France Inter le 6 juillet. L’objectif est de réduire le déficit public, qui s’élevait à 5,8 % du PIB l’an passé et doit atteindre 4,6 % en 2026. Aucun ministre n’a précisé le périmètre envisagé pour un tel gel.

Selon l’ancien fonctionnaire François Ecalle, spécialiste des finances publiques interrogé par l’AFP, les absences de revalorisations pourraient théoriquement concerner aussi les revalorisations tarifaires des professionnels de santé ou encore les avancements de carrière automatique des fonctionnaires. Le barème de l’impôt sur le revenu ou la contribution sociale généralisée – réévalués en fonction de l’inflation – pourraient aussi être figés.

Pour ces deux derniers cas, la conséquence serait que certains ménages verraient leurs contributions augmenter et d’autres foyers, auparavant épargnés, deviendraient imposables. Il s’agirait donc d’une augmentation déguisée des impôts, bien que le gouvernement se soit longtemps fait un principe de toute hausse fiscale à l’exception des plus fortunés.

Effets récessifs

Une année blanche générale n’a jamais été mise en œuvre en France. En revanche, des gels de certaines dépenses ont plusieurs fois été décidés. Sous la présidence de François Hollande, entre 2014 et 2016, les pensions de retraite n’ont pas été revalorisées. Le point d’indice des fonctionnaires a également été gelé sur plusieurs exercices au cours des dernières années.

Le gain attendu de cette mesure pour les finances publiques est difficile à anticiper avant d’en connaître le périmètre. L’institut des politiques publiques et l’Observatoire français des conjonctures économiques ont récemment partagé des estimations proches selon lesquelles une année blanche sur les prestations permettrait d’économiser entre 5,7 et 6 milliards d’euros environ. Si l’on se concentre sur les transferts monétaires aux ménages, le gel de l’ensemble des prestations sociales indexées (dont les retraites et le chômage) rapporterait 5 milliards d’euros, et 1,2 milliard d’euros de plus grâce au gel du barème de l’impôt sur le revenu. Des estimations bien éloignées des 40 milliards d’euros d’économies recherchées par le gouvernement.

Les opposants à cette mesure mettent par ailleurs en garde contre ses effets récessifs : en entraînant une baisse de la consommation et des investissements, elle pourrait en retour pénaliser les rentrées fiscales.