Depuis des décennies, ce système incite les clients à utiliser l’électricité sur certaines plages horaires quand la consommation globale du réseau est plus faible, en particulier la nuit, contre des prix plus avantageux. Mais ces créneaux d’heures creuses/heures pleines vont bientôt commencer à être modifiés par Enedis, le gestionnaire du réseau de distribution français. Libé fait le point sur les changements à venir.
Que va-t-il se passer ?
La réforme se fera en deux temps, entre novembre 2025 et octobre 2027. A partir du 1er novembre 2025 et jusqu’à juin 2026, Enedis repositionnera les créneaux heures creuses /heures pleines de 1,7 million de clients, qui disposent jusqu’à présent d’heures creuses l’après-midi et la nuit. L’hiver, les créneaux de 7 à 11 heures le matin et 17 à 21 heures ne seront plus en heures creuses. L’été, il n’y aura plus d’heures creuses de 7 à 10 heures du matin et de 18 à 23 heures. Ces créneaux plus abordables subsisteront à la mi-journée et la nuit.
Data
La seconde phase interviendra à partir de décembre 2026 et concernera 9,3 millions de clients. Ils verront alors leurs heures creuses différer entre l’été (1er avril-31 octobre) et l’hiver (1er novembre-31 mars), principalement entre 11 heures et 17 heures l’été. A noter que pour les clients professionnels, le changement ne s’appliquera qu’à partir du deuxième semestre 2027, «à leur demande» selon le site d’Enedis.
Qui est concerné ?
La réforme ne s’appliquera qu’aux clients ayant un compteur communicant Linky. Au total, 11 millions de foyers sont concernés, sur les 14,5 millions disposants de l’option. Les 3,5 millions restants bénéficient déjà de plages horaires compatibles avec les nouvelles règles. Chacun pourra consulter ses nouveaux créneaux sur l’espace client de son fournisseur ou sur sa prochaine facture.
A terme, les créneaux seront différents d’un bâtiment, voire d’un appartement à l’autre. Enedis effectuera les modifications à distance, en fonction des contraintes locales du réseau. Les opérations devraient se faire au rythme de 10 000 clients par jour, soit environ 300 000 par mois.
Décryptage
Les clients, déjà informés par leur fournisseur d’électricité, n’auront rien à faire sur leur compteur ou leur contrat. «Les appareils reliés au compteur électrique [comme les chauffe-eaux avec contacteur jour /nuit] s’adapteront automatiquement», souligne Enedis. Mais «les autres [équipements] devront être reprogrammés manuellement ou via des prises connectées».
Pourquoi cette réforme est-elle nécessaire ?
Mis en place dans les années 1960 dans la foulée de la construction des premières centrales nucléaires, l’objectif des heures pleines/heures creuses était de déplacer vers la nuit une partie de la consommation pour utiliser l’électricité produite à ce moment-là.
La réforme actuelle vise à s’adapter au boom des énergies renouvelables – notamment solaire, dans le courant de la journée –, mais aussi aux changements de modes vie et de consommation, le développement des voitures électriques à recharger ou encore de la climatisation.
«Pas mal de plages d’heures creuses sont placées à des moments qui ne sont plus des moments creux pour le système, et inversement, on a assez peu d’heures creuses à des moments qui sont utiles pour le consommateur et pour le système», expliquait la présidente de la Commission de régulation de l’énergie, Emmanuelle Wargon, en présentant la réforme en février.
Quel effet devrait avoir cette réforme ?
Le directeur du programme flexibilités d’Enedis, Timothée Furois, évoque «un outil de flexibilité majeur au service du système électrique». Ce changement devrait permettre de déplacer «de l’ordre de 5 gigawatts de consommation vers l’après-midi pendant les mois les plus ensoleillés», estime-t-il. Soit environ l’équivalent de la production de cinq réacteurs nucléaires. «C’est une opportunité pour les clients d’être à la fois acteurs de la transition énergétique […] et de bénéficier de prix plus avantageux» lorsque la «production décarbonée solaire est la plus abondante», synthétise le responsable d’Enedis.
Outre la baisse des factures, le gestionnaire du réseau de distribution espère équilibrer le système électrique et réduire le phénomène des prix dits «négatifs» de l’électricité, lorsque l’offre est supérieure à la demande et que les prix passent en dessous de zéro. Par exemple, si les chauffe-eaux sont programmés pour fonctionner la nuit, ils ne permettent pas d’absorber la production solaire abondante en journée.