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Libération
Proposition de loi

Le Sénat vote pour l’interdiction du démarchage téléphonique

Proche du harcèlement, cette pratique est dans le viseur des sénateurs qui ont adopté ce jeudi 14 novembre une proposition de loi interdisant de la prospection par téléphone. Pour entrer en vigueur, le texte doit être voté dans les mêmes termes à l’Assemblée nationale.
Selon un sondage effectué en octobre par l’UFC Que choisir, cosignataire, 97% des Français se déclarent agacés par le démarchage commercial. (Maeva Destombes/Hans Lucas. AFP)
publié le 14 novembre 2024 à 12h12

Et si un monde où la sonnerie de téléphone n’était pas synonyme d’un énième démarchage commercial était possible ? Répondre à des appels sans devoir éconduire une personne faussement enjouée récitant un script publicitaire ou entendre une voix robotique nous vendre on ne sait quel service ? Le Sénat a adopté à l’unanimité ce jeudi 14 novembre en séance publique une proposition de loi du groupe Les Indépendants - République et Territoires (centristes) visant à interdire «à un professionnel de démarcher téléphoniquement un consommateur». Le texte doit maintenant passer à l’Assemblée nationale et être voté dans les mêmes termes par les députés pour entrer en vigueur.

Une mesure fortement soutenue par les associations de consommateurs qui ont appelé, ce jeudi dans un communiqué commun, à mettre «enfin un terme au harcèlement marketing». Selon un sondage effectué en octobre par l’UFC Que choisir, cosignataire, 97% des Français se déclarent agacés par le démarchage commercial. Actuellement, «chaque citoyen est présumé consentant pour être démarché, ce qu’on appelle “l’opt-out”, explique le sénateur Pierre-Jean Verzelen qui a déposé cette proposition de loi. Je propose d’inverser la donne et que l’on considère que chaque Français refuse d’être démarché», soit le principe de l’«opt-in». Le texte laisse la possibilité à un consommateur de signifier son consentement pour être démarché par une entreprise.

Deux types de prospections déjà interdites

Actuellement, il est possible de s’inscrire en ligne sur la liste d’opposition Bloctel, mise en place en 2016, et créée par la «loi Hamon» sur la consommation de 2014. Seules exceptions : les démarchages pour de la presse, les instituts de sondage, les associations et les entreprises avec lesquelles le consommateur a déjà une relation commerciale. «Je suis inscrit sur Bloctel et je suis démarché tout le temps», témoigne Pierre-Jean Verzelen. Ces dernières années, d’autres mesures sont venues encadrer davantage le démarchage, autorisé uniquement du lundi au vendredi, hors jours fériés et durant certains horaires. Un même professionnel n’a pas non plus le droit de démarcher un consommateur plus de quatre fois par mois.

Depuis 2020, deux types de prospections ont été totalement interdits : le démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique et le rabattage par téléphone, SMS, mail ou sur les réseaux pour le compte personnel de formation. Le non-respect de l’inscription de ces règles est passible d’une amende de 75 000 euros au maximum pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. Mais dans les faits, «il y a très peu de sanctions. Le cadre actuel ne fonctionne pas. l’Etat ne se donne pas la puissance de respecter la loi», estime Pierre-Jean Verzelen. Alors que la solution est à portée de main, selon le parlementaire. Il prend notamment l’exemple de l’Allemagne.

«Le démarchage téléphonique sans le consentement explicite préalable du consommateur est interdit en Allemagne. Le consentement du consommateur doit être documenté et conservé par celui qui fait le démarchage pendant cinq ans. La sanction en cas de non-respect de cette règle peut aller jusqu’à une amende de 300 000 euros», résume le Centre européen des Consommateurs qui défend aussi d’obtenir obligatoirement le consentement du consommateur avant tout démarchage et de mettre à sa disposition «un bouton de révocation comparable au bouton de résiliation sur les sites Internet». En 2023, l’Agence fédérale des réseaux a infligé 1,4 million d’euros d’amende pour des appels marketing non sollicités, contre 1,15 million d’euros en 2022. Le nombre de plainte de son côté a quasiment été divisé par deux.