Les deux entreprises sont situées à une trentaine de kilomètres l’une de l’autre, au cœur d’une zone d’activité dense entre Rouen et Evreux. Très dépendantes des commandes de leurs clients dans l’aéronautique, la pétrochimie ou l’automobile, Manoir Industries et Dedienne Multiplasturgy ont vécu une année 2020 difficile, affectées notamment par le ralentissement dû à la pandémie. La première, lâchée par son actionnaire chinois, est tombée en redressement judiciaire ; la seconde s’est lancée dans la production de masques. Elles ont pu compter sur le soutien de l’Etat.
Manoir Industries, hanté par les doutes
A l’entrée du site, une inscription sur le bâtiment de l’usine annonce la couleur : «Manoir Industries Aciers spéciaux». On arrive sur un territoire de haute précision. La fonderie historique de la vallée de l’Andelle produit des fours et des assemblages pour la pétrochimie, des tubes et de la robinetterie pour le nucléaire, des aiguillages pour le ferroviaire et même des «freins de bouche» pour les canons des chars de l’armée. Ses clients s’appellent EDF, Total, Lummus ou Versalis. «Le carnet de commandes est plein, ça veut dire qu’on n’est pas si mauvais que ça !, ironise Eric Lafon, élu CGT au comité social et économique de l’entreprise. S’ils reviennent, c’est qu’ils sont contents. On a une réputation.» Dans le petit local qui leur sert de lieu de lutte depuis deux mois, les cinq autres représentants des salariés présents approuvent la célébration du savoir-faire local. Mais les têt