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Sanctions

Du «triple A» à A+, la lente dégradation de la France par les grandes agences de notation

Après Moody’s et Fitch, Standard & Poor’s a, vendredi 17 octobre, de nouveau abaissé la note de la dette souveraine de la France, de AA- à A+. Il est loin le temps où les trois principaux acteurs du secteur accordaient au pays le «triple A», indice d’une fiabilité financière maximale.

La première dégradation de la France par Standard & Poor’s est intervenue en 2012 dans le contexte de la crise de la dette en zone euro. (Emmanuel Dunand/AFP)
ParDominique Albertini
Chef de service - Politique
Publié le 18/10/2025 à 15h32

Passée du convoité «triple A», qu’elle détenait jusqu’en janvier 2012, à un simple A+, depuis le 17 octobre 2025, la France a vu sa note financière dégradée à quatre reprises par Standard & Poor’s (S&P), la principale des agences de notation qui évaluent la capacité des pays à rembourser leurs dettes. La première est intervenue le 13 janvier 2012, dans le contexte de la crise de la dette en zone euro. Durant celle-ci, la capacité de plusieurs pays partageant l’euro, comme la Grèce et l’Italie, à rembourser leurs dettes est mise en doute, entraînant une perte de confiance dans l’avenir de la monnaie unique. Si la France, alors dirigée par Nicolas Sarkozy, ne fait pas partie des pays les plus en difficulté, elle peine déjà à réduire son déficit public et s’endette à des conditions moins favorables que l’Allemagne.

Redoutée depuis plusieurs mois, objet de fortes controverses politiques, la perte du triple A est vécue comme un déclassement symbolique du pays. Ses conséquences sont cependant limitées sur le plan financier. La nouvelle note du pays (AA+) reste bonne et les taux d’intérêt de la France, toujours considérée comme une valeur sûre, ne divergent pas significativement de ceux de l’Allemagne.

Mesure sans effet majeur

La deuxième dégradation intervient le 8 novembre 2013. La France passe de AA+ à AA, la troisième note sur l’échelle de S&P. Bien que le nouveau président, le socialiste François Hollande, se soit engagé dans une politique de l’offre, l’agence juge que ses premières réformes fiscales et sociales «n’augmenteront pas substantiellement les perspectives de croissance de la France à moyen terme», et pointe également le niveau élevé de chômage dans le pays. Revers politique pour le pouvoir et symbolique pour le pays, la mesure, là encore, est sans effet majeur sur la capacité d’emprunt de la France.

Les deux dégradations suivantes se succèdent rapidement sous le deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron, alors que les finances publiques ont durablement souffert de la crise du Covid et des baisses fiscales décidées par le gouvernement. La première baisse, de AA à AA-, intervient le 31 mai 2024 et sanctionne, selon S&P, un «déficit budgétaire [...] en 2023 [...] nettement plus élevé que ce que nous avions prévu». La seconde, à A+, ce vendredi 17 octobre 2025, vise non seulement cette situation budgétaire, guère améliorée, mais aussi l’instabilité politique provoquée par la dissolution de l’Assemblée nationale qu’a décidée en juin 2024 le chef de l’Etat.

Dégradations peu à peu banalisées

En parallèle, la note de la France a aussi été dégradée par les autres grandes agences de notation. Elle pointe désormais au quatrième rang auprès de Moody’s et au cinquième chez Fitch. D’abord objets de débats politiques passionnés, suscitant aussi des mises en question des biais et de la fiabilité des agences de notation, ces dégradations se sont peu à peu banalisées. Parmi les économies européennes de taille comparable à la France, seule l’Allemagne détient encore son triple A. Le Royaume-Uni est noté «AA», l’Italie BBB+, le huitième rang dans la notation de S&P. Mais, contrairement à Paris, Rome a récemment vu cette note relevée.