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Economie : le déficit commercial de la France revient sous les 100 milliards

Avec 99,6 milliards d’euros en 2023, la France échappe de justesse au seuil des 100 milliards de déficit commercial, sauvée par le recul des prix de l’énergie importée.
Cette photographie prise le 12 septembre 2023 montre la chaîne de production de la nouvelle voiture électrique Peugeot e-3008 à l'usine Stellantis de Sochaux, dans l'est de la France, le 12 septembre 2023. (Arnaud Finistre/AFP)
publié le 7 février 2024 à 18h06

L’année 2022 avait été catastrophique, avec un déficit commercial record à 164 milliards d’euros. Le premier semestre 2023 avait donné des motifs d’espoir. Finalement, l’économie française limite la casse sur l’année 2023, avec 99,6 milliards d’euros de perte. Il s’agit néanmoins du deuxième plus gros déficit de l’histoire du pays. Depuis 2002, la France n’a pas dégagé d’excédent commercial.

«C’est grâce à la baisse de la facture énergétique, mais aussi à la relance des exportations !», s’est réjoui mercredi sur X l’ancien et peut-être futur ministre délégué au Commerce extérieur Olivier Becht – le poste étant pour le moment vacant – saluant une «bonne nouvelle pour la France». La hausse des prix de l’énergie importée avait expliqué en grande partie l’explosion du déficit commercial en 2022, sur fond de guerre en Ukraine.

Mais en 2023, le coût des approvisionnements énergétiques de la France a chuté d’un tiers, selon les statistiques annuelles des Douanes, selon lesquelles «cette diminution s’explique essentiellement par les prix», largement revenus à la normale après l’emballement de 2022. Ainsi, les importations d’hydrocarbures ont chuté de 29 % (à 65 milliards d’euros), et celles de l’électricité de 63 % (à 9 milliards d’euros), avec un parc nucléaire français revenu à une plus grande capacité de production. La baisse des importations s’est aussi généralisée au pétrole, au gaz et au gaz naturel liquéfié.

En parallèle, les importations de biens manufacturés se sont aussi inscrites en légère baisse, notamment dans la chimie et la métallurgie, sur fond de baisse des prix de l’énergie, ces produits présentant une forte intensité énergétique.

«41 milliards d’euros de plus qu’en 2019»

Dans leur ensemble, les importations françaises ont représenté 731 milliards d’euros l’an dernier. Soit un recul de 7,1 % sur une année, ce qui ne doit pas faire oublier que dans l’absolu, le déficit commercial de la France cette année représente tout de même «41 milliards d’euros de plus qu’en 2019.» selon Olivier Redoulès, directeur des études pour l’institut Rexecode. «C’est considérable et on ne sait pas trop si on sera capables de le résorber», a-t-il précisé, mettant en avant la dégradation économique et «la déferlante chinoise en automobile».

Ainsi, selon les statistiques des Douanes, les importations de voitures ont augmenté de 16,7 % l’an dernier, s’élevant à 80 milliards d’euros. La conséquence de tensions moins fortes sur les approvisionnements et d’une demande en hausse de véhicules électriques, en particulier venant de Chine.

Et pour la suite ? Le déficit commercial «restera aussi probablement important en 2024», a concédé Laurent Saint-Martin, ex-député macroniste (2017-2022), ancien rapporteur général du budget de l’Assemblée nationale, et actuel directeur général de Business France, une organisation qui accompagne les entreprises françaises dans leurs projets à l’international. Dans son Projet de loi de Finances (PLF), le gouvernement prévoit un déficit commercial de 95 milliards d’euros en 2024, après avoir anticipé 105 milliards d’euros pour 2023.

Des exportations légèrement en hausse

Quant à savoir si l’économie française retrouvera un jour un excédent commercial, il semble que ce n’est pas pour tout de suite. «Les retournements de balances commerciales nécessitent d’énormes investissements de capacités de production chez soi et une projection à l’international plus massive», explique encore Laurent Saint-Martin. Selon l’ancien candidat aux élections régionales 2021 en Île-de-France, les initiatives du gouvernement français en matière de réindustrialisation et d’incitations à s’implanter à l’étranger pourraient porter leurs fruits dans un horizon de dix ans.

Pour l’heure, les exportations françaises ont augmenté de 1,5 % en 2023 par rapport à 2022, contribuant plus modestement à l’amélioration de la balance commerciale. Parmi les secteurs les plus dynamiques, les exportations dans l’aéronautique et l’automobile ont augmenté de plus de 16 % sur un an. Celles des ventes de machines ont progressé de 9 %, tandis que le textile et les équipements électriques affichent aussi une belle croissance.

Dans l’absolu, les produits agroalimentaires continuent de représenter une part importante des exportations françaises avec 62,7 milliards d’euros l’an dernier (+2,2 % sur un an), tout comme la chimie, la métallurgie et la pharmacie. Les parfums, produits de beauté et les sacs à main ont de leur côté affiché des excédents historiques.

Dernier indicateur de cette toute relative bonne nouvelle pour la santé de l’économie française, le «déficit des transactions courantes» – un indicateur qui englobe à la fois les échanges de biens, de services et de revenus – est passé de 54 milliards en 2022 à 34,6 milliards d’euros en 2023, a précisé la Banque de France mercredi 7 février.