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Libération
Pas de temps à perdre

A la tête de Twitter, Elon Musk commence déjà à exécuter ses plans

La rentabilité financière et l’idéologie libertarienne sont les mots d’ordre qui président à la stratégie d’Elon Musk, aux manettes de Twitter depuis jeudi.
Le logo de Twitter et une photo d'Elon Musk sont affichés à la loupe dans cette illustration prise le 27 octobre 2022. (Dado Ruvic /Reuters)
par Amani Dhifaoui
publié le 30 octobre 2022 à 20h14

La purge a déjà commencé. Deux jours après la finalisation d’une opération de rachat très médiatique qui fera date tant en termes de business qu’en termes de story telling, Elon Musk a les pleins pouvoirs sur Twitter. Après avoir licencié, dans la foulée de l’annonce du rachat, une grande partie de l’équipe dirigeante du réseau, le milliardaire envisage maintenant de supprimer jusqu’à 30 % du personnel de certains départements de l’entreprise, et ce à partir de ce week-end. «Ce sera un bain de sang», ont confié des sources à la presse américaine.

Des sources internes à l’entreprise, sous couvert d’anonymat par crainte de représailles, ont rapporté au New York Times que des réductions d’effectifs ont été ordonnées dans toute l’entreprise. Les responsables encore en poste ont été invités à lister les employés dont ils pourraient se séparer, certaines équipes devraient être concernées plus que d’autres.

L’ampleur des licenciements n’a pas pu être déterminée pour l’instant. A Twitter qui compte environ 7 500 employés, les coupes devraient être particulièrement brutales dans le département Produit, avec des responsables de l’ingénierie et des chefs de produit à éjecter. Le service marketing, qui est considéré en interne comme bien fourni en salariés, pourrait faire l’objet d’une purge très sévère. «Je pense que les gens se préparent à un lundi noir, mais la question est de savoir où se fera la majorité des coupes», a déclaré une source au site américain Axios.

Des Teslas plein le garage

Les licenciements chez Twitter devraient avoir lieu avant le 1er novembre, date à laquelle les options d’achat d’actions attribuées trimestriellement à la plupart des employés doivent être acquises. Ces actions représentent généralement une part importante de la rémunération des employés. En procédant à des licenciements avant cette date, Musk peut éviter de payer les attributions, bien qu’il soit censé payer les employés en espèces à la place de leurs actions, selon les termes de l’accord de rachat.

Peu après l’arrivée du nouveau boss, le garage du siège de Twitter à San Francisco a commencé à se remplir de Teslas sur les places réservées, garées en rang, a déclaré une source au média Axios. Le nouveau patron aurait commencé à faire venir des ingénieurs de Tesla pour interviewer des ingénieurs du réseau social et commencer à examiner les produits et le code de l’entreprise. Il aurait aussi commencé à faire appel à ses amis et à ses proches pour réorganiser l’entreprise. Musk n’a pas encore annoncé qui, parmi les membres de son cercle restreint, il comptait recruter pour remplacer les cadres supérieurs licenciés.

La purge entamée par Musk montre sa détermination à remodeler l’organisation de Twitter, pour en faire une entreprise plus rentable, mais aussi une plateforme de «liberté absolue» comme il l’avait promis. Et il n’a pas tardé ce week-end à donner l’exemple à ses 112 millions d’abonnés en réagissant à l’agression de Paul Pelosi, époux de la représentante démocrate Nancy Pelosi, par un suprémaciste de droite. En réponse à Hillary Clinton, qui a partagé un article du Los Angeles Times sur le suspect de l’attaque, Musk a tweeté, puis supprimé : «Il y a une infime possibilité qu’il y ait plus dans cette histoire qu’il n’y paraît». Plus tôt dans la journée, il a cité un site web très discrédité qui laissait entendre que l’attaque brutale contre Paul Pelosi n’avait pas été perpétrée par un blogueur d’extrême droite déséquilibré, mais qu’elle était plutôt liée à une «théorie» anti-LGTBQ concernant une escarmouche dans un bar local. Il a également fait un lien vers un article du Santa Monica Observer, un site web connu pour avoir publié des fake news. Le site «est tout sauf digne de confiance», selon un dirigeant du média NewsGuard, qui emploie des journalistes qualifiés pour évaluer les sites d’information. Le site de Santa Monica est tombé en panne tôt ce matin, peu après la publication du tweet - apparemment en raison d’un afflux de trafic lié au tweet de Musk.

Le nouveau propriétaire de Twitter, libertarien assumé, et critique vis-à-vis de la réglementation sur la modération des réseaux sociaux, se présente comme un ardent défenseur de la liberté absolue d’expression, faisant craindre aux partisans d’une modération solide des contenus un regain de propos haineux ou de désinformation. Après le licenciement, entre autres, de la juriste Vijaya Gadde qui était dans le viseur de Musk depuis des mois pour avoir participé au bannissement à vie de Donald Trump de la plateforme, le nouveau patron qui relaye des médias conspirationnistes sur un fait de violence, ne fait que confirmer les craintes sur l’avenir du réseau social.