Menu
Libération
Coup de bol

Anguilla, l’île des Caraïbes qui a fait fortune grâce à son nom (et à l’IA)

Avec son nom de domaine internet aux initiales de l’intelligence artificielle (AI), Anguilla, petite île inconnue du grand public, est devenue la coqueluche des géants de la tech.
Le nord-est d'Anguilla, petite île des Caraïbes (Hedelin /ANDBZ. ABACA)
publié le 25 mars 2024 à 16h46

Les noms de domaine des sites français finissent par «.fr», ceux des américains par «.us», ceux de cette petite île des Caraïbes par «.ai» : un diminutif qui vaut désormais une fortune. Des centaines de milliers d’entreprises de la tech payent aujourd’hui très cher pour intégrer ces deux lettres magiques à leur site, symbole de leur hype et de leur modernité. Une tendance qui rapporte ainsi des millions de dollars à Anguilla.

C’est sa forme allongée qui a valu le nom d’«Anguilla» (anguille) à cette île britannique des Caraïbes de 16 000 habitants, à l’est de la République dominicaine. Un heureux hasard qui mènera en 1988 l’Internet Assigned Numbers Authority à lui accorder son nom de domaine : «.ai». Un non-événement à cette époque, devenu l’assurance d’un pactole avec l’essor de l’intelligence artificielle et le lancement de ChatGPT par OpenAI en novembre 2022.

Google, Meta ou Nvidia… Nombreux sont les mastodontes du milieu de la tech à avoir adopté le «.ai» pour mettre en avant leur branche consacrée à l’intelligence artificielle. Du côté de X (ex-Twitter), x.ai renvoie directement vers une page dédiée à Grok, l’intelligence artificielle générative de Elon Musk supposée concurrencer OpenAI. Près de 300 000 entreprises du numérique ont opté pour le «.ai» en 2023, a affirmé pour Bloomberg Vince Cate, l’homme qui a géré ces noms de domaine pour Anguilla pendant des années.

Les noms de domaine, un business juteux

Certaines paient ainsi une centaine de dollars pour que le nom de leur site se termine par le convoité «.ai». Pour d’autres, la facture se compte en milliers. Anguilla a ainsi engrangé en 2023, 32 millions de dollars, soit 10 % de son PIB. Et la ferveur ne serait pas près de s’éteindre : «Je pense que nous sommes aux débuts de l’IA, donc à ceux de noms des sites. ai», poursuit Vince Cate.

Cet argent inattendu a bénéficié aux habitants de l’île. Ellis Webster, le Premier ministre d’Anguilla s’est vanté, dans le New York Times, d’avoir permis aux citoyens de plus de 70 ans d’avoir accès à des soins gratuits ou encore d’avoir construit une école et un centre de formation professionnelle. Anguilla en avait bien besoin : en 2017, elle a été touchée par un ouragan dévastateur, et la pandémie de Covid l’a longtemps privée de touristes.

Anguilla n’est pas la seule à avoir touché le jackpot. L’île de Tuvalu, au nord-est de l’Australie, a également surfé sur son nom de domaine : «.tv». Un diminutif naturellement prisé par les services télévisés et de vidéo à la demande, mais aussi des géants du streaming comme Twitch.tv. L’île de Tuvalu a dans un premier temps cédé les droits d’administration du «.tv» à l’entreprise américaine Verisign pour 2 à 5 millions de dollars par an, avant de les confier en 2022 à GoDaddy pour la somme 10 millions de dollars.