«C’est une victoire pour des règles du jeu équitables et pour la justice fiscale», a célébré ce mardi 10 septembre la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, après les décisions de la justice européenne de définitivement donner raison à la Commission européenne contre Apple et Google dans deux dossiers judiciaires au long cours et aux lourds enjeux financiers.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), tribunal de dernière instance, a décidé qu’Apple devrait rembourser 13 milliards d’euros d’arriérés fiscaux à l’Irlande pour avoir bénéficié d’une imposition trop avantageuse, assimilée à une aide d’Etat illégale. L’affaire remonte à 2016 quand Bruxelles avait ordonné au fabricant des célèbres iPhone de rembourser ces 13 milliards à l’Irlande. La somme correspond aux bénéfices tirés d’un traitement fiscal favorable accordé entre 2003 et 2014 dans ce pays où Apple avait rapatrié l’ensemble de ses revenus engrangés en Europe - ainsi qu’en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde -.
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Pour la Commission, la filiale irlandaise de la marque à la pomme avait réglé un taux d’imposition dérisoire sur ses bénéfices européens «allant de 1 % en 2003 à 0,005 % en 2014». Mais, en première instance, le tribunal de l’UE avait annulé en 2020 la décision de l’exécutif européen. Une claque retentissante alors infligée à la commissaire Margrethe Vestager, responsable du dossier. La Commission avait alors formé un pourvoi auprès de la CJUE pour contester cette décision.
Mais nouveau coup de théâtre en novembre 2023. Dans un avis non contraignant, mais généralement suivi par les juges, l’avocat général Giovanni Pitruzzella avait remis en cause la victoire d’Apple. Il avait proposé à la cour d’annuler l’arrêt et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal de l’UE «afin que celui-ci se prononce à nouveau sur le fond». La Cour a décidé ce mardi de statuer «définitivement sur le litige et confirme la décision de la Commission européenne de 2016 : l’Irlande a accordé à Apple une aide illégale que cet État est tenu de récupérer», explique-t-elle dans un communiqué. Le gouvernement irlandais a de son côté assuré qu’il «respectera» cette décision de la justice européenne.
Google à nouveau sanctionné pour non-respect du droit à la concurrence
Par ailleurs, dans un arrêt séparé, la Cour basée à Luxembourg a confirmé une amende contre Google s’élevant à 2,4 milliards d’euros pour des pratiques anticoncurrentielles, et datant de 2017. La justice estime que la firme américaine a bien abusé de sa position dominante sur le marché des recherches en ligne «en favorisant son propre service de comparaison de produits». Il s’agit de la deuxième plus lourde sanction financière jamais imposée par l’UE dans un dossier concernant des pratiques commerciales anticoncurrentielles.
L’affaire a débuté en 2010 avec l’ouverture d’une enquête de Bruxelles consécutive à des plaintes de concurrents. L’entreprise est accusée d’avoir favorisé son comparateur de prix, Google Shopping, en rendant ses compétiteurs pratiquement invisibles pour les consommateurs. Elle a été contrainte de modifier l’affichage de ses résultats de recherches afin de se conformer aux exigences européennes.
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Saisi par le géant californien pour contester l’amende, le Tribunal de l’UE avait donné raison à la Commission, dans un premier jugement prononcé en novembre 2021. Mais Google avait formé un nouveau pourvoi, réclamant l’annulation de cette sanction. Ce dossier est l’un des gros contentieux ouverts par Bruxelles à l’encontre de Google qui détient le record des deux plus grosses amendes jamais infligées par l’exécutif européen pour des pratiques anticoncurrentielles.
Celle de 2,4 milliards au sujet de Google Shopping représentait un montant record à l’époque où elle a été prononcée. Elle a déjà été dépassée en 2018 par une autre de 4,3 milliards sanctionnant un abus de position dominante de son système d’exploitation Android pour téléphones mobiles. Au total, Google s’est vu infliger plus de 8 milliards d’euros d’amendes par l’UE pour diverses entorses à la concurrence.
Mise à jour : à 12h27, avec la réaction de la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager et du gouvernement irlandais.