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Apple, Google, Facebook, Amazon : pour quels motifs l’Europe a-t-elle lancé des procédures d’infraction contre les géants du numérique ?

La Commission européenne a lancé le 25 mars cinq procédures contre Apple, Alphabet, Amazon et Meta soupçonnés d’infractions aux nouvelles règles européennes de la concurrence sur les marchés numériques (DMA).
La commissaire européenne chargée de l'Europe et de l'ère numérique, Margrethe Vestager, et celui chargé du marché intérieur, Thierry Breton, ce lundi à Bruxelles. (Virginia Mayo/AP)
publié le 25 mars 2024 à 15h14

L’Europe durcit le ton envers les géants du numérique. Cinq procédures ont été lancées ce lundi 25 mars par la Commission européenne à l’encontre des géants du numérique Apple, Amazon, Alphabet (Google) et Meta (Facebook, Instagram), pour non-conformité au nouveau règlement sur les marchés numériques (DMA pour Digital Markets Act), en place depuis le 7 mars. «Nous pouvons déjà observer des changements sur le marché. Mais nous ne sommes pas convaincus que les solutions proposées par Alphabet, Apple et Meta respectent leurs obligations», justifie le commissaire européen au Numérique, Thierry Breton.

Le lobby de la tech, CCIA, a aussitôt dénoncé la «précipitation» de Bruxelles. Le lancement de ces enquêtes, 18 jours seulement après la date limite du 7 mars pour la mise en conformité, «risque de confirmer les craintes de l’industrie que le processus soit politisé». S’estimant en conformité, les groupes Apple, Alphabet, Meta et Amazon ont néanmoins affirmé lundi qu’ils poursuivraient leur dialogue avec Bruxelles, dans des communiqués séparés. Le nouveau règlement prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 20 % du chiffre d’affaires mondial en cas d’infraction grave et répétée (contre 10 % jusqu’ici). Bruxelles s’est également doté d’un pouvoir de démantèlement des contrevenants, une arme de dissuasion et de dernier recours. Qu’est-ce que l’Europe reproche concrètement aux géants du numérique ? On fait le point.

Google accusé de favoriser ses propres comparateurs

D’abord, la Commission reproche à Alphabet d’avoir exploité le quasi-monopole de son moteur de recherche Google pour favoriser, grâce à de meilleurs référencements, ses propres services de comparateurs de prix au détriment des concurrents dans la recherche d’hôtels, de billets d’avion ou d’autres biens de consommation vendus en ligne. Google a déjà été condamné en 2017 à une amende de 2,4 milliards d’euros pour ce motif. Mais les remèdes proposés n’ont jamais été jugés satisfaisants.

Les magasins d’applis App Store et Google Play pas assez ouverts

Alphabet et Apple sont par ailleurs visés pour des restrictions dans leurs magasins d’applications Google Play et App Store. Selon la Commission, les deux groupes «limitent la capacité des développeurs à communiquer et promouvoir librement leurs offres et à conclure directement des contrats» avec les utilisateurs finaux, «notamment en imposant divers frais». Sur ce dossier, Apple s’est déjà vu infliger début mars une amende de 1,8 milliard d’euros par la Commission, au terme d’une enquête ouverte en juin 2020 après une plainte de la plateforme de streaming musical Spotify. Jeudi, le gouvernement américain a également assigné Apple en justice pour pratiques monopolistiques en raison des contraintes fixées par le groupe californien aux développeurs d’applications.

La Commission va également se pencher sur le nouveau système de tarification d’Apple qui pourrait enfreindre son obligation de permettre des téléchargements d’applications sur des boutiques alternatives à son App Store.

Les applications par défaut d’Apple trop compliquées à désinstaller

Bruxelles a ouvert une autre procédure visant Apple soupçonné de ne pas avoir respecté l’obligation d’offrir aux utilisateurs un moyen de désinstaller facilement les applications par défaut sur le système d’exploitation iOS qui équipe ses célèbres iPhone. La Commission craint en particulier que «la conception de l’écran de choix du navigateur web n’empêche les utilisateurs d’exercer véritablement leur choix» d’une alternative à Safari.

Facebook et Instagram font un chantage aux données personnelles

Meta, géant des réseaux sociaux, est lui visé pour manquement à la règle qui le contraint à demander le consentement des utilisateurs afin de pouvoir combiner des données personnelles, issues de ses différents services, à des fins de profilage publicitaire. Pour se conformer, Meta a proposé aux utilisateurs de Facebook et Instagram un abonnement payant qui permet d’éviter d’être ciblé par la publicité. Mais s’ils souhaitent conserver un service gratuit, ils doivent consentir à livrer leurs données personnelles. Bruxelles estime que ce choix «n’offre pas de véritable alternative».

Amazon soupçonné de trop favoriser ses produits maison

La Commission va par ailleurs rassembler des informations sur le système de référencement d’Amazon, craignant qu’il ne favorise ses propres marques de produits sur son site de e-commerce.