Du vent dans la startup nation ? Binance France, filiale tricolore du géant des cryptomonnaies fondé par le Chinois Changpeng Zhao, aurait monté de toutes pièces des formations pour demandeurs d’emploi afin d’inciter les participants à utiliser ses services, affirme une enquête du Financial Times (FT) publiée mardi 5 décembre. Sous couvert de donner des cours sur la blockchain, l’objectif principal de Binance était en réalité de faire de l’acquisition de clients, selon le média britannique.
Organisées avec le concours de la start-up de formation professionnelle Simplon, ces journées étaient présentées comme des programmes éducatifs et visaient, selon le Financial Times, «les zones les plus défavorisées de France». Le journal britannique a recueilli le témoignage de jeunes ayant participé à des formations à Aulnay-sous-Bois et à Montreuil, en Seine-Saint-Denis. «Ils nous ont dit qu’un développeur blockchain junior pouvait gagner 100 000 euros par an, alors évidemment, nous avons tous eu des étoiles plein les yeux», raconte l’un d’eux, affirmant aussi qu’on lui a demandé d’ouvrir un compte Binance pour pouvoir recevoir son «diplôme» sous la forme d’un NFT, objet informatique relevant de plus en plus de l’escroquerie.
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En outre, selon les témoins cités par le FT, l’entreprise leur demandait également de télécharger l’application Metamask, un portefeuille virtuel de cryptomonnaies. Sans oublier la distribution de sacs surprises avec des brochures promotionnelles, de casquettes de la marque et d’autres goodies aux participants d’ateliers de Binance Charity. Des pratiques qualifiées de «harcèlement» par certains participants, la plupart issus de quartiers populaires.
Binance s’était fixé pour objectif de former ainsi 10 000 personnes d’ici la fin de l’année 2023, mais moins d’une centaine auront finalement reçu des cours de codage, selon le journal.
Invitation à l’Elysée et visas technologiques
D’après un avocat cité par le Financial Times, s’ils sont avérés, ces faits violent la réglementation française qui interdit aux sociétés enregistrées auprès de l’Autorité des marchés financiers de faire des démarches marketing non sollicitées auprès de clients potentiels. Binance France pourrait ainsi faire l’objet de poursuites pénales.
Par ailleurs, le FT pointe explicitement le gouvernement français et Emmanuel Macron, accusés de courtiser outrageusement Binance depuis deux ans, malgré le blanchiment d’argent auquel se sont livrés l’entreprise et son ex-patron aux Etats-Unis. Le Financial Times rappelle notamment l’invitation de Changpeng Zhao à l’Elysée, en 2021, et cite une source anonyme affirmant que le gouvernement français a accordé une centaine de visas technologiques à Binance pour l’aider à développer son activité dans le pays.