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Justice

De premiers sites pornos commencent à être bloqués en France pour absence de contrôle de l’âge des utilisateurs

Conformément à un arrêt de la Cour d’appel de Paris, les fournisseurs Internet ont coupé l’accès ce vendredi 15 novembre à XHamster, Tukif, Mrsexe et Iciporno en raison de l’absence d’un contrôle «autre que déclaratif» de l’âge des internautes.
Saisie par deux associations de protection de l’enfance, la cour d’appel de Paris avait rendu le 17 octobre un arrêt demandant le blocage de plusieurs sites porno hébergés hors d’Europe. (Thibaut Durand/Hans Lucas. AFP)
publié le 15 novembre 2024 à 17h38
(mis à jour le 15 novembre 2024 à 19h47)

Si vos sites préférés s’appelaient XHamster, Tukif, Mrsexe ou Iciporno, c’est la fin de la récré. Enjoints il y a un mois par la justice de bloquer l’accès à ces quatre sites pornographiques «dans un délai de quinze jours», les fournisseurs d’accès internet ont fini par obtempérer ce vendredi 15 novembre après s’être vus notifier l’arrêt exécutoire. Parmi les fournisseurs d’accès contactés par Libération, seul Bouygues Télécom a confirmé avoir bloqué les sites ce vendredi, mais les quatre étaient bien devenus inaccessibles dans le courant de l’après-midi, comme l’avait signalé Politico. XHamster aura tenu un peu plus longtemps que les autres, tandis que Mrsexe a un temps procédé à un blocage préventif, affichant sur sa page d’accueil un message disant qu’il étudiait «toutes les possibilités pour être en conformité avec la législation française à l’avenir».

Saisie par deux associations de protection de l’enfance, la Voix de l’enfant et e-Enfance, la cour d’appel de Paris avait rendu le 17 octobre un arrêt demandant le blocage de plusieurs sites pornographiques hébergés hors d’Europe, en raison de l’absence de contrôle de l’âge des utilisateurs. Et ce, «jusqu’à ce que soit démontrée la mise en œuvre par ces derniers d’un contrôle autre que purement déclaratif de ce que les utilisateurs sont majeurs», précisait-elle alors.

Dans son arrêt, la Cour d’appel jugeait que «l’intérêt supérieur de l’enfant» est une «considération primordiale» qui justifie de porter atteinte à «d’autres droits tels que la liberté d’expression». Elle avait toutefois accordé un sursis aux plateformes hébergées dans l’UE – Pornhub, Youporn, Redtube, Xvideos ou Xnxx –, attendant une réponse de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour rendre sa décision.

Selon la loi sur les violences conjugales de 2020, les sites pornos doivent vérifier que les mineurs n’accèdent pas à leurs contenus et ne pas se contenter d’une simple déclaration de majorité. Mais les sites pornographiques multiplient depuis des années les procédures en justice pour éviter son application. «On est très satisfaits que la justice ait eu le courage de constater l’illégalité de ces sites qui ne respectent pas leurs obligations légales», a réagi auprès de Libération Justine Atlan, directrice générale d’e-Enfance, qui rappelle que le combat de son association «n’est absolument pas contre les sites pornos, mais pour la protection de l’enfance» mais évoque une situation «dramatique et urgente». Aujourd’hui, dit-elle, «100 % des mineurs ont accès à la pornographie. Donc si demain il n’y en a plus que 50 % ce serait une avancée importante».

Une vérification de l’âge par carte bancaire étudiée

Selon l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), 2,3 millions de mineurs visitent chaque mois des sites pornographiques. Dès 12 ans, plus de la moitié des garçons utilisant Internet se rendent en moyenne tous les mois sur ces sites. Pour éviter que des mineurs puissent y accéder, le gendarme de l’internet, qui cherche à imposer des méthodes de contrôle, a proposé temporairement – le temps qu’une autre solution technique soit disponible –, que les sites imposent d’entrer ses identifiants de carte bancaire au moment d’accéder au site.

Une proposition incluse dans son référentiel adopté en octobre, pour lequel Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a rendu un avis favorable. Mais ce vendredi, la Fédération bancaire française a remis en question cette idée de contrôles d’âge par carte bancaire, la jugeant peu efficace voire dangereuse, en évoquant notamment des risques d’hameçonnage.

Mise à jour à 19h47 avec la réaction de l’association e-Enfance