En résumé :
- Depuis ce vendredi matin, des ordinateurs qui tournent sous Windows sont en panne dans de nombreux pays du monde, de l’Europe à l’Amérique, en passant par l’Asie, l’Océanie et l’Afrique. Le bug provient d’une défaillance du système de protection CrowdStrike, dans le système d’exploitation de Microsoft. Des particuliers, des entreprises, des systèmes de santé ou encore des infrastructures de transports sont affectés.
- Le patron de CrowdStrike a affirmé en fin de matinée que sa société «travaille activement avec les clients touchés par un défaut trouvé dans une seule mise à jour de contenu pour les hôtes Windows. Les hôtes Mac et Linux ne sont pas concernés. Il ne s’agit pas d’un incident de sécurité ou d’une cyberattaque». Il affirme même que «le problème a été identifié, isolé et un correctif déployé».
- Pour mesurer la gravité de la panne informatique en cours, plusieurs experts informatiques renvoient au précédent WannaCry, en mai 2017. A la différence qu’il s’agissait cette fois d’une cyberattaque. Ce virus de fabrication nord-coréenne s’était introduit par le biais d’une faille de sécurité de Microsoft, et avait affecté 300 000 ordinateurs à travers 150 pays.
En Formule 1, l’écurie Mercedes touchée par le «blue screen of death» au Grand Prix de Hongrie. L’image prête à sourire. Dans les stands de l’équipe allemande, deux membres du staff, dont on devine l’air dépité, font face au terrible écran bleu causé par la panne internationale de Microsoft . En conférence de presse, l’ingénieur Mercedes a assuré que l’événement, bien que contraignant, n’a pas été lourd de conséquences : heureusement, le problème intervient un vendredi, jour des essais libres. «Ca a demandé un peu de travail, mais c’est réglé.» Difficile de se montrer trop critique, CrowdStrike, l’entreprise à l’origine de la panne, sponsorise l’écurie - et apparaît même sur le dos de ses maillots.
Pierre Ducrozet sur la panne mondiale : «Enfin, on s’arrête et on relève le nez»
Interview
Des panneaux publicitaires de Times Square virent au bleu avant de s’éteindre. Le temple de la publicité américain n’a pas été épargné par la panne informatique mondiale. Parmi la centaine d’écrans diffusant continuellement des spots ultra colorés pour le dernier film ou téléphone à la vente, quelques panneaux led ont affiché le fameux «blue screen of death» au beau milieu de la nuit. Visibles pendant un moment sur les webcams diffusant en direct l’une des places les plus connues de la Grosse Pomme, ces carrés bleus sont finalement devenus noirs. Bien que moins impressionnantes que le Black Out qui avait plongé Times Square dans le noir en juillet 2019, ces images assez rares ont été diffusées par The Straits Times.
Le ministère des Armées affirme ne pas être touché par la panne. Le sujet avait été mis sur la table par Jean-Luc Mélenchon dans la matinée. Le leader des Insoumis s’inquiétait que «Microsoft équipe des armes françaises et le ministère de la Défense». «Tout va bien ? Vous comprenez enfin ce que veut dire indépendance nationale et souveraineté ?» «Tout va bien», répond en quelque sorte le ministère des Armées. «Le ministère des Armées n’est ni impacté sur ses opérations, ni sur les réseaux de travail quotidien de ses agents», explique-t-il dans un communiqué. «Le ministère des Armées n’utilise pas la solution CrowdStrike pour ses réseaux. Il n’est donc pas affecté par cette panne.»
Tout tourne de nouveau rond aux JO de Paris. Les activités «ont repris normalement» cet après-midi au sein de l’organisation des JO de Paris, qui a subi des perturbations pendant plusieurs heures dues à la panne informatique mondiale, ont annoncé les organisateurs. «En conséquence les centres des accréditations ont pu reprendre leurs opérations», a précisé le Comité organisateur des Jeux (COJO), ajoutant que le centre de distribution des uniformes avait également «rouvert ses portes». Ces deux activités ont été affectées quelques heures par la panne.
Des banques affectées par la panne en Afrique du Sud. Capitec, la plus grande banque sudafricaine, a subi «des problèmes de système à l’échelle nationale après une série de problèmes techniques» causés par la panne informatique mondiale de CrowdStrike, rapporte le média américain Bloomberg. Idem du côté de la banque Absa, avec des problèmes de «fonctionnalité dans l’application». Cette a toutefois précisé quelques heures plus tard que «l’accès a été rétabli» et «le problème technique lié à la panne mondiale résolu». Sur son compte X, Capitec a également rassuré ses clients : «tous nos services sont désormais de nouveau opérationnels», a acté la banque.
Pas de cataclysme à Wall Street. La Bourse de New York a ouvert en petite baisse, soupesant l’impact de la panne informatique géante. Le Dow Jones cédait 0,5%, le Nasdaq, à dominante technologique, stagnait (-0,01%) et le S&P 500 cédait 0,05% vers 16h25 (heure française). Les actions du Dow Jones étaient ébranlées par «des perturbations techniques généralisées risquant d’intensifier le recul des valeurs technologiques», a commenté Art Hogan de B. Riley Wealth Management. Jeudi, Wall Street avait conclu en nette baisse, pour la deuxième séance de suite pour le secteur technologique. L’indice Dow Jones avait lâché 1,29%, le Nasdaq avait reculé de 0,70% et le S&P 500 de 0,78%.
De Palerme à Alicante, «je ne sais pas si les autres voyageurs vont pouvoir partir ». Andrea, 20 ans, qui s’est levé à 2 heures du matin pour attraper son vol à l’aéroport de Bruxelles, Delphine, en partance pour Lisbonne mais bloquée à Orly… Des milliers de passagers sont affectés par la panne géante de ce vendredi 19 juillet, qui complique notamment l’enregistrement dans certains aéroports. Libération a pu échanger avec des voyageurs bloqués en transit. Nos témoignages.
Dans l’aéroport de New Delhi, «tout le monde est désemparé». Subhash, 34 ans, était impatient de rentrer chez lui, à Bangalore, après une «longue semaine» de travail et de rendez-vous professionnels. Mais c’était sans compter sur l’immense file qui l’attendait devant l’aéroport de New Delhi. «En Inde, certains aéroports utilisent un outil de reconnaissance faciale pour pouvoir entrer. Mais comme le système ne marchait pas, la sécurité a dû vérifier chaque voyageur manuellement», raconte le trentenaire. Résultat : la file s’allonge, et l’avion décolle finalement, sans lui. «Plein de passagers l’ont raté. Et quand je suis finalement entré dans l’aéroport, j’ai demandé au personnel de réserver un nouveau vol, mais je ne pouvais pas effectuer le paiement car ce système était lui aussi en panne, ni réserver en ligne», poursuit Subhash, qui précise que de nombreux vols sont retardés ou annulés. Après plusieurs heures d’attente, il réussit finalement à obtenir des billets, pour un vol prévu dans la soirée. «Maintenant, j’attends encore ma carte d’embarquement. Mais je n’avais jamais rien vu de pareil. L’aéroport est bondé. Il y a des écrans bleus partout, on n’arrive pas à voir les heures des vols. Les voyageurs comme le personnel, on ne sait pas quoi faire. Tout le monde est désemparé.»
Les hôpitaux français épargnés par la panne. Interrogé par Libération, le président de Fédération des Hôpitaux de France, Arnaud Robinet, confirme que «les hôpitaux ne sont pas touchés par la panne» sauf sur des aspects mineurs, comme «la reconnaissance vocale». En parallèle, le ministère de la Santé précise à l’AFP que «les autorités sanitaires restent mobilisées et vigilantes à l’évolution de la situation» mais «qu’un nombre limité d’établissements et acteurs du système de santé déclarent des dysfonctionnements légers sans conséquence sur la continuité des soins». Contrairement à la France, plusieurs hôpitaux néerlandais ont signalé être touchés par la panne, entraînant la fermeture d’un service d’urgences et le report d’opérations.
Pas de «grand bazar» dans les aéroports parisiens. Dans les aéroports parisiens, tout devrait bientôt «rentrer dans l’ordre», annonce Aéroports de Paris au Parisien. «Nous n’avons pas le logiciel en question. À dessein, parce que nous ne voulions justement pas être dépendants des Américains en cas de problème», précise-t-on. Ce sont principalement des compagnies états-uniennes, comme American Airlines ou Delta, qui ont été affectées, explique-t-on encore, ce qui a provoqué des difficultés à l’enregistrement, «ce qui a pu occasionner des retards. Mais il n’y a pas eu d’annulations de vol en série, ni de grand bazar».
Près de 40 vols de Transavia France annulés. La compagnie à bas coûts du groupe Air France-KLM «confirme qu’en raison d’une panne informatique mondiale affectant notamment plusieurs compagnies aériennes et aéroports dans le monde, ses opérations sont perturbées. Des retards et annulations sont à prévoir », a précisé l’entreprise sur son site internet, en détaillant 38 liaisons annulées, en pleine période de pointe estivale. Sont concernés notamment des vols depuis ou vers Paris-Orly, Berlin, Nantes, Cagliari, Tanger ou encore Tirana.
Les avions atterrissent de nouveau à Zurich. Le plus gros aéroport de Suisse accueille de nouveau des appareils. Depuis la mi-journée, les avions peuvent de nouveau atterrir à Zurich, même si la panne informatique mondiale entraînant toutefois de nombreux retards et annulations de vols. «Les restrictions de capacité ont été levées avec effet immédiat», a annoncé dans un communiqué Skyguide, qui gère la navigation aérienne en Suisse et avait imposé des restrictions de 30% dans la matinée pour les vols de transit par mesure de précaution.
Le boss de CrowdStrike s’excuse pour le zbeul mondial. «Nous sommes profondément désolés pour les désagréments que nous avons causé aux clients, aux voyageurs, à tous ceux qui ont été affectés par ce problème, y compris notre entreprise», a déclaré George Kurtz, le PDG de l’entreprise de cybersécurité CrowdStrike, sur l’émission «Today» de la chaîne américain NBC News, à la mi-journée. La panne provient d’une mise à jour liée à l’antivirus proposé par le groupe américain CrowdStrike, affectant Windows et un grand nombre de ses utilisateurs. Selon George Kurtz, «de nombreux clients sont en train de redémarrer le système, qui est en train de se rétablir et qui sera opérationnel». «Cela pourrait prendre un certain temps pour certains systèmes qui ne se rétablissent pas automatiquement», a-t-il ajouté, promettant que CrowdStrike «s’assurera que chaque client est entièrement rétabli».
EXCLUSIVE: CrowdStrike founder and CEO @George_Kurtz speaks on TODAY about the major computer outages worldwide that started earlier today: “We’re deeply sorry for the impact that we’ve caused to customers, to travelers, to anyone affected by this.” pic.twitter.com/fWz6KhgrcZ
— TODAY (@TODAYshow) July 19, 2024
Des services des urgences en rade dans plusieurs Etats américains. La police de l’Alaska a déclaré sur Facebook que les services d’appels d’urgence et de non-urgence sont interrompus dans tout l’État, en raison de la panne informatique mondiale. Les services d’urgence du New Hampshire et de l’Ohio ont aussi publié des messages similaires.
En Amérique du sud aussi on prend ses dispositions. La compagnie aérienne chilienne Latam Airlines a annoncé ce vendredi en début d’après-midi que ses vols pourraient subir des retards en raison de la panne informatique mondiale. L’entreprise recommande à ses voyageurs de vérifier l’état de leurs billets d’avions en prévention.
✊
"Faire grève dans l'informatique, ça sert à rien, on n'a pas de pouvoir de blocage" pic.twitter.com/3xjn6C5UQx
— Solidaires Informatique ⏚ (@SolInfoNat) July 19, 2024
A l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry, «on fait désormais tout en manuel, ce qui prend un temps fou». C’est vers 7 h 30 ce matin que Pauline (le prénom a été modifié), 28 ans, a appris la nouvelle. «En plein embarquement Transavia, on s’est rendus compte que le système ne fonctionnait plus», témoigne l’agent d’escale, qui travaille pour Alyzia, une entreprise de sous-traitance pour les compagnies aériennes à l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry. «Au début, on a cru que le problème venait de Transavia, mais depuis, la plupart de nos systèmes d’enregistrement sont down.» Résultat : comme le veut la procédure, «on fait désormais tout en manuel, ce qui prend un temps fou. Absolument tous nos vols sont retardés, ce qui impactera la journée complète», déplore Pauline. Autour d’elle, «les voyageurs semblent inquiets» face au risque de voir leur vol annulé, ou de rater leur avion. «Mais ils comprennent aussi la situation et qu’on essaie de faire au mieux», poursuit l’agent d’escale. Avant d’insister : «Une longue et difficile journée nous attend.»
«Pour accueillir les athlètes, pour délivrer les accréditations… ça ralentit nos opérations sur le terrain», explique Tony Estanguet, patron des Jeux.
La panne informatique mondiale affecte aussi #Paris2024 :
— franceinfo (@franceinfo) July 19, 2024
"Pour accueillir les athlètes, pour délivrer les accréditations... ça ralentit nos opérations sur le terrain", affirme Tony Estanguet, patron des Jeux pic.twitter.com/r5eR7vOgYB
Un bug d’une ampleur inédite depuis au moins sept ans. Pour mesurer la gravité de la panne informatique en cours, plusieurs experts informatiques renvoient au précédent WannaCry, en mai 2017. A la différence qu’il s’agissait cette fois d’une cyberattaque. Ce virus de fabrication nord-coréenne - un ransomware, ou logiciel de rançon - s’était introduit par le biais d’une faille de sécurité de Microsoft, et avait affecté 300 000 ordinateurs à travers 150 pays. De nombreux hôpitaux britanniques avaient notamment été touchés. En France, l’entreprise Renault avait fait partie des victimes, entraînant notamment des arrêts de production de véhicules.