Tout compte fait, il lâche l’affaire. Le directeur général d’OpenAI Sam Altman a fait savoir lundi 5 mai que l’entreprise californienne à l’origine de ChatGPT abandonnait son projet de devenir une société à but lucratif, qui était vivement contesté par des observateurs du secteur de l’intelligence artificielle (IA) mais également par Elon Musk.
Billet
«OpenAI n’est pas une entreprise normale et ne le sera jamais», a écrit Sam Altman dans un courriel adressé au personnel et publié lundi sur le site internet de l’entreprise. «Nous avons pris la décision de rester une société à but non lucratif après avoir écouté des leaders de la société civile et échangé avec les bureaux des procureurs généraux (des Etats américains) de Californie et du Delaware», a-t-il annoncé.
Le fleuron de l’IA est devenu une des start-ups les plus prospères de l’histoire de la Silicon Valley, propulsée en 2022 par son outil d’IA générative ChatGPT. Après une crise au sein de l’entreprise en 2023, des investisseurs majeurs d’OpenAI avaient souhaité pouvoir faire fructifier leurs placements dans une structure vouée à être rentable, eu égard notamment aux coûts considérables liés à la conception, à l’entraînement et au déploiement des modèles d’IA comme ChatGPT.
«Pas à vendre»
L’an dernier, OpenAI, dont les ambitions dans le secteur de l’IA nécessitent des dizaines de milliards de dollars d’investissement, avait dévoilé un plan de passage au statut d’entreprise à but lucratif dans les deux ans. Mais des critiques avaient jugé ce projet dangereux au vu de la puissance des outils d’intelligence artificielle et parce que ce changement de structure aurait selon eux fait passer les intérêts des actionnaires avant ceux de la société civile.
L’homme le plus riche de la planète, Elon Musk, avait également critiqué ce plan, qui nécessitait par ailleurs l’approbation des Etats de Californie et du Delaware où OpenAI est respectivement basée et enregistrée. Le PDG de Tesla avait notamment intenté une action en justice visant, entre autres, à empêcher cette transition. En dépit du changement d’avis de Sam Altman, l‘avocat du milliardaire a fait savoir à Reuters lundi qu’Elon Musk comptait malgré tout poursuivre la procédure.
A lire aussi
Musk et Altman faisaient partie de l’équipe de 11 personnes qui a fondé OpenAI en 2015, le premier apportant un financement initial de 45 millions de dollars. Mais leurs relations sont exécrables depuis qu’Elon Musk a quitté en 2018 l’entreprise, qu’il a aussi proposé en février de racheter. Sam Altman lui avait alors sèchement répliqué qu’OpenAI n’était «pas à vendre».
Dans le nouveau plan d’OpenAI, la branche commerciale de l’entreprise pourra faire des profits mais, point capital, restera sous la supervision d’un conseil d’administrateurs comme une organisation à but non lucratif. Rester une société à but non lucratif «nous permettra de continuer de réaliser des progrès rapides et sûrs et de donner à tous l’accès à une IA performante», a estimé lundi Sam Altman.
Société d’utilité publique
Dans le détail, cette branche commerciale est entrain de passer du statut d’organisation à but lucratif plafonné à celui de société d’utilité publique, que possèdent déjà ses concurrents Anthropic et xAI. Auparavant, ses investisseurs ne pouvaient pas multiplier par plus de 100 leur mise, les bénéfices excédentaires étant reversés à l’organisation à but non lucratif. D’après The Verge, le nouveau statut autorisera investisseurs et employés à détenir des actions ordinaires, sans plafonnement. Ce qui devrait aider OpenAI à lever plus facilement des fonds.
Reste à attendre la réaction des investisseurs d’OpenAI, comme celle de la société d’investissement japonaise SoftBank qui avait fait du passage au statut à but lucratif une condition de sa récente annonce d’un apport massif de 30 milliards de dollars.
Cette somme pourrait désormais descendre à 20 milliards, selon une clause prévue par un document officiel. La participation de SoftBank fait partie d’une levée de fonds de 40 milliards de dollars annoncée fin mars, la plus importante jamais vue pour une société non cotée dans le secteur technologique. Ce nouveau tour de table valorise la société californienne 300 milliards de dollars.