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Libération
Reportage

La Machinerie, un tiers lieu pour «la réappropriation citoyenne du numérique»

Panorama des tiers-lieuxdossier
Le FabLab d’Amiens gère un espace de coworking pour des projets tournés vers la sensibilisation au numérique du grand public.
A la Machinerie, à Amiens, on trouve d’un côté un espace de coworking, avec location des bureaux, qui assure des recettes à l’association, de l’autre un fablab, financé par des subventions. (Albert Facelly/Libération)
par Stéphanie Maurice, correspondante à Lille et photos Albert Facelly
publié le 27 août 2021 à 5h03

Cafétéria et coworking, atelier avec imprimantes 3D et outils de découpe numérique : sur la table où sont exposées les réalisations, un petit robot translucide cohabite avec un masque à visière hérité du Covid. La Machinerie, sise dans une ancienne imprimerie à Amiens, a un côté hétéroclite qui la rend difficile à définir. Un espace citoyen, c’est sûr, branché numérique, une évidence. Né en 2014 de la rencontre d’un collectif, Utopic, qui avait mené un tour de France des alternatives sociales, et d’une agence web, Etoele, qui avait mis en place un petit FabLab, ce tiers lieu s’est construit pièce par pièce, au gré et des opportunités. «Ils vous ont raconté que les deux fondateurs se sont connus grâce au covoiturage ?» sourit Raphaël Degenne, directeur d’Ombelliscience, une association de partage des savoirs scientifiques, qui suit le lieu depuis ses débuts. «Des gens se rencontrent parce qu’ils partagent un besoin commun, et s’aperçoivent qu’ils peuvent créer des connexions autres.» Une définition en soi des tiers lieux.

La base du projet est restée la même au fil des années, même si le lieu a déménagé et s’est agrandi, 4 000 m² aujourd’hui : d’un côté un espace de coworking, avec location des bureaux, qui assure des recettes à l’association, de l’autre un FabLab, financé par des subventions. Le parc de machines numériques est ouvert aux habitants et aux professionnels, contre une cotisation annuelle de 15 euros. En contrepartie de l’utilisation de ces outils, les usagers doivent enrichir la documentation de leurs plans, de leurs échecs et réussites, pour aider ceux qui suivront. Gaël Hennegrave, étudiant en génie mécanique, et stagiaire au FabLab, a connu la structure comme cela, en venant bricoler. Il était trop à l’étroit dans sa chambre d’étudiant, et voulait fabriquer un robot d’exploration, pour lui faire visiter des catacombes en Normandie.

La Machinerie compte neuf salariés, pour un budget annuel de 600 000 euros. Ils animent le FabLab, gèrent l’espace de coworking, et portent les projets menés avec différentes structures, dont Ombelliscience, par exemple, OpenBot, un programme de sensibilisation à la robotique lancé avec l’Education nationale. Les élèves s’amusent à écrire un programme informatique, en assemblant des éléments de code disponibles pour faire bouger un robot miniature. Ses composants, roues, carte électronique, moteur et batterie, sont visibles, manière de montrer que ce n’est pas si compliqué. «C’est une volonté de permettre la réappropriation citoyenne du numérique et de la technique, pour ne pas être déboussolé par un objet comme celui-là», précise Marie Fauvarque, coordinatrice de la Machinerie.

Le tiers lieu s’est aussi lancé dans un programme d’accompagnement de projets issus de l’économie sociale et solidaire : par exemple, les Recyclettes qui récupèrent les déchets des restaurants sur Amiens pour les valoriser en compost. En 2020, la Machinerie a obtenu le label «Fabrique numérique de territoire», en association avec cinq autres tiers lieux. Un début de reconnaissance de leur utilité publique.