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Libération
Nerf de la guerre

Après IBM, la Commission européenne suspend ses publicités sur X (ex-Twitter) face à la désinformation et aux discours de haine

Après l’annonce d’IBM de suspendre ses activités sur le réseau social après l’apparition de ses réclames aux côtés de contenus pro-nazis, la Commission européenne fait de même avec une suspension de toute publicité sur X.
Le logo de X (ex-Twitter). (KIRILL KUDRYAVTSEV/AFP)
publié le 17 novembre 2023 à 14h19
(mis à jour le 17 novembre 2023 à 17h28)

Contrairement à ce que prétendait Andy Warhol, n’importe quelle publicité n’est donc pas une bonne publicité. La Commission européenne fait savoir, ce vendredi 17 novembre, qu’elle a demandé à ses services de suspendre toute campagne d’annonces sur X (ex-Twitter), en raison de la «hausse alarmante de la désinformation et des discours de haine» sur le réseau. IBM, géant américain de l’informatique, faisait de même jeudi 16 novembre en expliquant suspendre ses réclames sur la plateforme, après avoir découvert sa présence aux côtés de contenus pro-nazis sur le réseau social.

L’exécutif européen avait déjà ouvert une enquête contre le réseau social en octobre, pour la diffusion présumée de «fausses informations», «contenus violents et à caractère terroriste» et «discours de haine» dans le cadre de la guerre entre le Hamas et Israël. X étant soumis à des obligations renforcées – au même titre que les autres plateformes – avec la mise en place de la nouvelle législation sur les services numériques (DSA). La décision de la Commission européenne de retirer ses annonces ne remet en revanche pas en question sa présence sur X, a précisé un de ses porte-parole.

Du côté d’IBM, des réclames pour les grandes entreprises de la tech (Apple, Oracle…) sont apparues près de publications favorables à Hitler et aux nazis, selon un rapport publié un peu plus tôt jeudi par l’ONG Media Matters, qui lutte contre la désinformation.

Réaction immédiate d’IBM, qui affirme «appliquer une tolérance zéro pour les discours de haine et les discriminations», et avoir «suspendu immédiatement toutes nos publicités sur X pendant que l’on enquête sur cette situation totalement inacceptable».

Dans la foulée, une responsable de X a déclaré avoir passé un «coup de balai» sur les comptes mis en cause par Media Matters, qui ne pourront plus monétiser des publicités sur le réseau. Les publications seront elles-mêmes marquées d’une mention «contenu sensible».

X s’est également défendu via un message sur la plateforme, en justifiant tant bien que mal la présence de publicités sur des contenus problématiques par «des outils automatisés de X qui ne sont pas capables de déterminer si une image est antisémite». Elon Musk lui-même est allé encore plus loin, en s’attaquant directement à l’ONG à l’origine de l’étude : «Media Matters est une organisation maléfique». Rien que ça.

La faille de la modération

Depuis le rachat de Twitter par Elon Musk fin octobre 2022, la plateforme a assoupli ses règles sur la désinformation, réduit ses équipes de modération et permis le retour de nombreuses personnalités controversées.

La plateforme renommée X s’est également vue épinglée à de nombreuses reprises pour ses manquements. Dans le viseur de l’UE pour son taux de désinformation et la manipulation russe en septembre, classé pire réseau sur la désinformation sur le climat par une coalition d’ONG le même mois, fuie par les chercheurs et défenseurs de l’environnement face au climat haineux cet été… Et la liste pourrait s’allonger.

La désinformation semble faire partie de la ligne éditoriale des aficionados du réseau, quand les utilisateurs «certifiés» – et payants – sur X produisent 74 % des affirmations fausses ou sans fondement les plus virales liées à la guerre entre Israël et Hamas.

Des utilisateurs qui ont tout intérêt à produire des contenus polémiques, puisque ces derniers sont ceux qui vont le plus faire réagir, sachant que la rémunération des comptes premium dépend du taux d’engagement sur leurs messages.

La position personnelle de Musk pose de plus en plus question. S’il n’est pas directement auteur de propos délictueux, il n’hésite pas à les appuyer. Mercredi, il a répondu en soulignant «la pure vérité» d’un message écrit par un utilisateur de X, selon qui «la communauté juive emploie les mêmes discours de haine contre les blancs que ceux qu’elle souhaite que l’on n’utilise plus contre elle-même». Le magnat s’est également attaqué à l’Anti Defamation League, organisation de lutte contre la haine et l’antisémitisme, qu’il accuse entre autres de «racisme anti-blanc». La ligue avait notamment dénoncé une hausse notable de la désinformation et des insultes homophobes et racistes sur le réseau social.

Mis à jour : à 17h30 avec le retrait des annonces de la Commission européenne.