Années 50, province de Saragosse, Espagne. Dario a perdu sa mère. Il se réfugie chez son grand-père où il passe son enfance. Aujourd’hui, l’octogénaire se rappelle des matchs de foot de l’équipe du coin auxquels ils assistaient ensemble. Des «moments très spéciaux pour lui», mais dont il n’a aucune photo. Le 6 mars 2024, il franchit alors la porte de Synthetic Memories, à Barcelone. Avec l’espoir fou que la technologie comble ce manque et crée de toutes pièces, grâce à l’intelligence artificielle générative, des images à partir de ses souvenirs. Comme Dario, mais aussi Denia et ses soirées dansantes barcelonaises des années 60, ou Bilal et ses souvenirs de manifestation au Liban lors du printemps arabe en 2011, ils sont près de 500 à avoir fait le choix d’immortaliser un souvenir grâce à l’IA.
Le processus est simple et gratuit, assure à Libération le concepteur du projet espagnol, Pau Garcia, 34 ans et designer. Il suffit de quarante minutes à une heure pour transformer un souvenir en photo. La séance se déroule à trois – le participant, une personne qui mène l’entretien, et une autre qui s’occupe de la partie plus technique avec l’intelligence artificielle. Le rendez-vous commence toujours avec la même question : «Quel est votre plus ancien souvenir ?» Vient ensuite une phase d’exploration de la mémoire, jusqu’à trouver un moment de vie cher à la personne sondée, si elle ne l’a pas identifié avant. Le technicien en charge de l’IA s’attarde, lui, sur les