Menu
Libération
Sevrage forcé

TikTok Lite : le système de récompenses de l’application, jugé «addictif» par l’UE, pourrait être suspendu dès jeudi

Aussi vite arrivé, aussi vite menacé : l’Union européenne pourrait mettre fin dès ce jeudi au système de récompense lancé fin mars par TikTok. Sauf si l’application fournissait rapidement une évaluation convaincante des risques de l’application.
TikTok Lite et son système de récompenses a été lancé fin mars 2024. (Kiran Ridley/AFP)
publié le 22 avril 2024 à 19h20

L’Union européenne semble bien partie pour joindre le geste à la parole. Après une enquête lancée ce lundi contre TikTok Lite, Bruxelles a menacé de suspendre dès jeudi la fonctionnalité du réseau social chinois qui récompense le temps passé devant les écrans, jugée trop encline à favoriser l’addiction de ses usagers. Le réseau social s’est dit «déçu» de l’ouverture de cette enquête, argumentant que «le programme de récompenses TikTok Lite n’est pas accessible aux moins de 18 ans et inclut une limite quotidienne pour le visionnage de vidéos» . Le groupe ByteDance, la maison mère de l’application, entend toutefois «poursuivre les discussions avec la Commission» sur ce sujet et a jusqu’au mercredi 24 avril pour se défendre

Avec ses vidéos courtes, TikTok, qui séduit plus de 1,5 milliard d’utilisateurs dans le monde, est accusé depuis plusieurs années aux Etats-Unis et en Europe de susciter des comportements de dépendance chez les adolescents. Sa version «Lite» accentue ces risques. L’usager de TikTok Lite amasse des «jetons» via différentes actions : en se connectant quotidiennement sur l’application, en aimant des contenus, ou plus simplement en regardant des vidéos. Beaucoup de vidéos. «La durée maximale de visionnage de vidéos récompensée est de 60 à 85 minutes», a précisé la plateforme. La collecte n’est donc pas infinie, mais journalière. Ces jetons sont ensuite échangeables contre des cartes-cadeaux sur des sites partenaires, comme Amazon.

La Commission européenne avait lancé une première mise en garde le 17 avril, en demandant à la plateforme de fournir sous 24 heures une évaluation des risques liés au déploiement de TikTok Lite, et de détailler les moyens mis en œuvre pour les réduire. Un document qui aurait dû être transmis à l’UE avant même le lancement de l’application, comme le demande la nouvelle législation sur les services numériques (DSA). Mais «TikTok n’a pas fourni le document dans les délais», a expliqué la Commission dans un communiqué. L’application a bénéficié d’un léger sursis, et devra désormais fournir cette évaluation mardi au plus tard.

Pour l’instance européenne, le mécanisme de récompenses pose «des risques graves pour la santé mentale des utilisateurs». Un constat rejoint par le commissaire européen au Numérique, Thierry Breton : «Les flux incessants de vidéos courtes et rapides peuvent sembler amusants, mais ils exposent nos enfants à des risques d’addiction, d’anxiété, de dépression, de troubles alimentaires, de réduction des capacités d’attention.»

Menaces d’interdiction de TikTok aux Etats-Unis

Faute de réponse avant jeudi, la Commission pourra imposer des amendes allant jusqu’à 1 % du chiffre d’affaires mondial annuel du groupe et des astreintes pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires quotidien.

En février, la plateforme chinoise était déjà sous le coup d’une enquête de la Commission pour manquements présumés en matière de protection des mineurs. De potentiels manquements qui, avant même le lancement de TikTok Lite, concernaient déjà la gestion des risques liés à la conception addictive et au contenu nocif du réseau social, mais aussi la transparence de la publicité, et l’accès aux algorithmes pour les chercheurs.

Aux Etats-Unis, la chambre des représentants a adopté un texte le samedi 20 avril menaçant d’interdire le réseau social sur fond de soupçon d’espionnage de la part de la Chine.