L’obligation US à trente ans se négociait mercredi 21 mai à un taux de 5,09 % à la clôture des marchés, et même 5,146 % à l’ouverture ce jeudi 22 mai. Un niveau jamais atteint depuis 2007.
Ce taux dépend du comportement des investisseurs qui ont acheté de la dette publique, vendue sous forme d’obligations. Pour les titres à 30 ans, ils agissent en fonction de leurs anticipations à très long terme. S’ils considèrent que le risque de défaut dans le futur augmente, ils auront tendance à vendre les obligations en leur possession, ce qui fait monter le taux. Ces derniers temps, la méfiance du milieu de la finance vis-à-vis de Donald Trump semble avoir augmenté, comme en témoigne la perte vendredi du rating triple A sur la dette américaine par l’agence de notation Moody’s.
Cette méfiance date en premier lieu du «Liberation day» trumpien début avril, jour de l’annonce d’une flambée des droits de douane américains pour la plupart de ses partenaires économiques. L’obligation à 30 ans était alors entrée dans une phase de hausse. Mais aujourd’hui, c’est surtout les discussions et l’anticipation d’un vote par le congrès sur le «Big Beautiful Bill», une autre loi que Trump veut faire passer, qui donne des sueurs froides aux investisseurs. Le premier volet de cette loi sabre drastiquement dans les dépenses sociales, notamment l’aide médicale pour les plus modestes. Mais c’est principalement le second volet qui provoque la méfiance : des réductions de taxes pour les plus riches et les grosses entreprises tellement massives que même le très conservateur Manhattan Institute indique que cela risque d’ajouter 6 000 milliards de dollars de déficit ces dix prochaines années. Ainsi, au-delà de la nature injuste de ce texte - on parle d’un effet de Robin des Bois inversé : prendre aux plus pauvres pour donner aux plus riches - c’est surtout le caractère excessif de ces cadeaux aux plus riches qui inquiète les marchés.
Le taux à 30 ans avait déjà subi de fortes poussées par le passé, notamment en 2023, dans un contexte d’inflation élevée et de tensions internationales. Aujourd’hui, les actions de Donald Trump en constituent le principal facteur explicatif.