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Libération
Publicités ciblées

Facebook et Instagram envisagent des abonnements payants à plus de 10 euros par mois

L’entreprise Meta, qui possède les deux réseaux sociaux, pourrait bientôt proposer des abonnements payants à ses usagers européens, qui verraient les pubs supprimées. Une tentative du géant américain de contourner un règlement européen.
Photo d'illustration. (Dado Ruvic/REUTERS)
publié le 4 octobre 2023 à 17h09

Le mastodonte du numérique Meta - à la tête de Facebook et Instagram - a sa propre méthode pour se conformer à la législation européenne sur l’utilisation de données personnelles. Le groupe de Mark Zuckerberg miserait sur des abonnements payants pour ses usagers européens, qui permettraient de ne plus voir de publicités. D’après une révélation du Wall Street Journal mardi 3 octobre, Meta travaille sur plusieurs formules.

Les utilisateurs auraient la possibilité de payer environ 10 euros par mois sur ordinateur pour leur compte Instagram et Facebook, et 13 euros pour les applications mobiles sur smartphone. Chaque compte supplémentaire pour un même usager entraînerait ensuite une hausse de 6 euros à la facture mensuelle.

Contrairement au modèle d’abonnement envisagé par Twitter - renommé X -, celui de Meta ne serait qu’optionnel. Mais continuer à utiliser ces réseaux sociaux gratuitement aurait toutefois un coût : celui de l’exploitation de ses données personnelles. De quoi remettre au goût du jour le dicton «quand c’est gratuit, c’est vous le produit».

Meta aurait exposé ce modèle d’abonnement aux régulateurs européens en septembre, sans réponse - officielle - de Bruxelles pour l’instant. Reste que proposer des abonnements payants représenterait un changement radical d’approche pour l’entreprise dont l’un des slogans, «free and always will be», figurait un moment sur le site de Facebook. Meta n’invente pourtant rien de nouveau avec un tel modèle économique. Sur Twitter, Netflix ou encore Amazon, des formules payantes ou plus chères permettent depuis peu de réduire le nombre de publicités et de proposer d’autres avantages.

Outre les rentrées d’argent que cela représenterait, cette évolution permettrait aussi à Meta de tenter de contourner le problème des contenus commerciaux ciblés, dans le collimateur de l’UE. Car entre Facebook, Instagram et WhatsApp, le groupe possède trois des plus importants environnements numériques, qui, s’ils peuvent communiquer entre eux, pourraient multiplier les informations recueillies et les annonces ciblées.

En juillet dernier, la Cour de justice de l’Union a rendu une décision confirmant que le géant du numérique n’avait pas le droit de partager des informations personnelles sur ses utilisateurs entre ses plateformes. Les usagers doivent alors «se voir proposer, le cas échéant moyennant une redevance appropriée, une option alternative équivalente ne s’accompagnant pas de tels traitements de données». Entre ses idéaux originels d’un internet libre, au prix de ses publicités ciblées, et la possibilité de tarifer une version de son site plus respectueuse des données de ses utilisateurs, Meta semble donc avoir fait le choix de l’entreprise, celui de l’argent.

La publicité ciblée, un modèle économique

Les pionniers du numérique Meta et Google ont bâti le modèle de leurs empires, et avec eux une partie de celui de l’économie numérique, sur ce modèle de données récupérées à l’insu de leurs utilisateurs. Les géants déjà en place agglomèrent des milliards de données personnelles, pour infliger des publicités ciblées. Du pain béni pour les annonceurs.

Mais l’Union Européenne a fini par mettre son nez dans ce far west numérique. Cela fait maintenant des années que l’UE lutte contre le pistage des internautes sans leur consentement. En témoigne l’adoption du règlement européen sur la protection des données (RGPD) en 2016, qui a notamment coûté 1,2 milliard d’euros à Meta en mai.

Cet été, c’est le règlement sur les marchés numériques (DMA) qui est entré en vigueur, avec la volonté de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Cette nouvelle loi s’attaque à l’avantage offert aux géants numériques par des bases de données immenses, couplées à des algorithmes puissants, qui ne laissent que peu de place à d’autres acteurs numériques ne bénéficiant pas d’un tel capital. Les plateformes numériques concernées ont jusqu’au 6 mars 2024 pour se conformer à ces nouvelles obligations.