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Finance verte : une étude fustige les activités des banques européennes

Portant sur les vingt plus grands établissements de l’UE, l’étude d’une ONG britannique affirme ce mercredi 22 novembre qu’aucune donnée ne permet de vérifier si leurs investissements «verts» participent réellement à la transition écologique.
Une agence du Crédit agricole à Nantes taguée par des activistes du mouvement écologiste Extinction Rebellion, en mai. (Maylis Rolland/Hans Lucas.AFP)
publié le 22 novembre 2023 à 19h00

Les vingt plus grandes banques européennes ne cessent de vanter leurs accomplissements en matière de «finance verte». L’ONG britannique ShareAction, spécialisée dans la promotion de l’investissement «responsable», démontre que ce n’est pas tout à fait vrai. A tout le moins, son étude publiée ce mercredi 22 novembre, pointe qu’aucune donnée ne permet de confirmer cette vertu écolo. Le directeur de recherche pour l’ONG et coauteur du rapport, Xavier Lerin, affirme ainsi que «d’après les déclarations des banques elles-mêmes et les objectifs qu’elles se fixent, il n’est pas clair si elles fournissent réellement le financement nécessaire à la transition».

L’étude note que si toutes ces banques se fixent des objectifs ou rendent compte de leurs activités dans la finance verte, elles ne publient le plus souvent pas le détail de leurs calculs et n’hésitent pas à comptabiliser certaines activités contestables dans les financements verts.

Le Crédit agricole compte le gaz comme une énergie «verte»

Par exemple, la banque espagnole BBVA a inscrit au titre de la finance verte quelque 300 milliards d’euros de «dépôts structurés» (des investissements dans des sociétés intégralement remboursables) sans forcément s’assurer par la suite que les entreprises dans lesquelles elles ont injecté cet argent ont développé des projets verts. La britannique Standard Chartered fait de même avec le conseil en fusions-acquisitions, qui n’a pourtant à première vue rien à voir avec la transition écologique. En réaction à la publication de l’étude, BBVA a pour sa part précisé que les dépôts concernés seraient utilisés pour alimenter un portefeuille de prêts ou obligations considérés comme «durables» – sans que cette affirmation soit vérifiable. Standard Chartered s’est, elle, refusée à tout commentaire.

ShareAction révèle également que «de nombreuses banques ont inclus des activités de production d’énergie à forte intensité de carbone» au titre de financements verts, «telles que l’extraction de gaz naturel (Crédit agricole) et certaines formes de biomasse pour la production d’électricité (Deutsche Bank)».

Le Crédit agricole a garanti pour sa part être «pleinement engagé dans le financement d’un avenir énergétique vert et s’efforce d’être totalement transparent et clair dans sa communication». La banque a notamment invoqué les différentes présentations publiques de sa stratégie. La Deutsche Bank a fait valoir que son cadre de finance durable «décrit de manière transparente [sa] logique de classification» des financements verts et a «reçu une vérification indépendante» par l’organisme spécialisé ISS ESG – une société de conseil en gestion des investissements.

35 % des banques mesurent l’impact de leur financement

Autre problème relevé par l’étude : seulement 35 % des vingt banques étudiées mesurent l’impact réel de leur financement. Un pourcentage encore plus faible consent à préciser si les financements concernent de nouveaux actifs ou des projets déjà existants. Face à la crise climatique, ShareAction appelle les établissements bancaires européens à publier leurs méthodologies dans le choix de leurs investissements «verts», ainsi qu’à se fixer des objectifs scientifiquement fondés – et pour ce faire, à mesurer l’impact de leurs investissements.

L’ONG recommande également aux décideurs politiques et aux régulateurs de fixer des normes scientifiques qui s’assurent que les banques mesurent correctement l’impact de leurs financements. Les banques sont régulièrement pointées du doigt pour leurs progrès trop lents en matière de transition écologique, alors qu’elles refusent, pour la plupart, de mettre fin au financement des activités les plus émettrices en carbone.