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Allocation des ressources

France Relance : selon l’Observatoire des multinationales, les entreprises privées bénéficient davantage du plan post-Covid que le public

Selon le bilan publié ce mardi 7 mai par l’association, les entreprises privées ont perçu jusqu’à deux tiers des près de 73 milliards d’euros de fonds déjà dépensés.
A l’origine, les 100 milliards d’euros du plan France Relance devaient être dépensés pour la transition écologique (à hauteur de 30 milliards d’euros), la compétitivité des entreprises (34 milliards) et la cohésion sociale (36 milliards). (Tetra/Getty Images)
publié le 7 mai 2024 à 9h11

La France relance le privé. Selon un bilan publié mardi 7 mai par l’Observatoire des multinationales, ce sont les entreprises privées qui ont principalement bénéficié du plan de relance post-Covid de la France. Elles ont perçu jusqu’à deux tiers des près de 73 milliards d’euros de fonds déjà dépensés. L’association, qui enquête souvent sur les dividendes versés par les groupes du CAC 40 ou les stratégies d’influence des multinationales, rappelle qu’à l’origine les 100 milliards d’euros du plan France Relance devaient être dépensés pour la transition écologique (à hauteur de 30 milliards d’euros), la compétitivité des entreprises (34 milliards) et la cohésion sociale (36 milliards).

Près de quatre ans après la présentation du plan, l’Observatoire assure qu’«au moins 29,5 milliards d’euros ont bénéficié directement aux entreprises», notamment via la baisse des impôts de production. À ces soutiens directs s’ajoutent «17,7 milliards d’aides à l’emploi, comme les subventions pour l’embauche de jeunes et d’apprentis», poursuit l’association. «Et sans doute aussi les aides» à la rénovation ou à l’achat de voitures électriques, qui ont profité aux consommateurs mais aussi «aux fournisseurs des produits et services concernés».

Avec ce calcul au périmètre large, «la proportion des dépenses de relance qui ont bénéficié exclusivement ou en grande partie aux entreprises dépasse dès lors les deux tiers des sommes décaissées», conclut l’Observatoire. Les organismes publics (Etat, collectivités locales, SNCF…) ont eux capté 19 % des montants déjà dépensés, tandis que 11 % des fonds déboursés sont déclarés «inclassables» par l’association.

Difficile traçabilité

Le plan de relance «s’inscrit dans le schéma classique de transformation de la société via le tissu productif et les aides individuelles aux entreprises», au détriment de l’investissement dans les services publics analyse Nadine Levratto, chercheuse au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) citée par l’Observatoire. «Or, quand on regarde les déterminants de la croissance et de la localisation des entreprises, la qualité des services publics joue beaucoup», prévient-elle.

L’Observatoire des multinationales déplore dans son bilan, la difficulté à identifier les bénéficiaires finaux du plan. «La France […] ne donne pas les bénéficiaires finaux de son plan de relance, regrette l’observatoire, mais liste essentiellement des opérateurs de l’État, soit différentes instances intermédiaires qui redistribuent les financements par la suite». Cette difficile traçabilité avait déjà été constatée par le comité d’évaluation de France Relance, un organisme placé auprès du Premier ministre, qui avait lui-même jugé dans son rapport final de janvier l’exercice «particulièrement complexe».

Le comité d’évaluation avait ainsi dressé un bilan plus positif de France Relance, soulignant la contribution du plan à la croissance, à l’emploi et à la réduction des émissions de CO2. Il estimait dans son rapport final que 21 milliards d’euros avaient été dépensés pour la transition écologique. L’Observatoire a lui fait valoir qu’il n’avait «pu flécher que 15,24 milliards d’euros» déboursés sur ce volet du plan de relance. «Les grands perdants de l’austérité risquent bien d’être les services publics et l’écologie : ce sont les domaines qui ont le moins bénéficié du plan de relance et dont les budgets sont les plus diminués» dans le décret de février qui a acté 10 milliards d’économies dans les dépenses de l’Etat, conclut-il.