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Défiance

Guerre commerciale : Wall Street dégringole encore, le CAC 40 a effacé ses gains depuis le début de l’année

Toujours pas remise des annonces de Donald Trump et face aux représailles de la Chine, la Bourse de Paris a reculé de plus de 4 % tandis que celle de New York a lâché près de 6 % ce vendredi 4 avril.
Le CAC 40 se dirige vers sa plus mauvaise semaine depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024. (Benoit Tessier/REUTERS)
publié le 4 avril 2025 à 10h56
(mis à jour le 4 avril 2025 à 22h45)

Au surlendemain des annonces de Donald Trump sur les droits de douane, les Bourses européennes et américaines avaient ouvert dans la rouge ce vendredi 4 avril au matin. Mais après l’annonce à la mi-journée par la Chine de droits de douane de 34 % sur toutes les importations de biens américains à partir du 10 avril, elles ont carrément sombré.

A tel point que la Bourse de Paris, qui a baissé de 4,26 % à sa fermeture, a effacé tous ses gains depuis le début de l’année. De son côté, l’Euro Stoxx 50 (-4,29 %), qui regroupe 50 des plus grandes capitalisations boursières sur le Vieux Continent, est à son plus bas depuis le 3 janvier.

A Wall Street aussi les investisseurs ont laissé éclater leur crainte ce vendredi, malgré 228 000 emplois créés en mars, plus que ce qui était prévu. La Bourse New York a chuté de près de 6 % à la cloture, pour la deuxième séance consécutive. Le Dow Jones a perdu 5,50 %, l’indice Nasdaq a fondu de 5,82 % et l’indice élargi S & P 500 a lâché 5,97 %, sa pire séance en Bourse depuis la crise du Covid-19 en 2020.

Des marques de la tech dirigées par des soutiens financiers et politiques de Donald Trump comme Meta, Apple ou encore Tesla ont chuté lourdement, tout comme le fabricant de cartes graphiques et acteur essentiel de l’intelligence artificielle Nvidia. «C’est vraiment le pire scénario pour la technologie, et je ne pense pas que nous ayons vu la fin des ventes, car ils continueront à souffrir jusqu’à ce que nous obtenions plus de clarté ou un changement de politique», a déclaré à Bloomberg Paul Stanley, directeur des investissements chez Granite Bay Wealth Management.

Tous les secteurs ou presque sont touchés. A 18 heures, les valeurs automobiles européennes, déjà frappées des 25 % de droits de douane de Donald Trump, continuaient leur dégringolade : -6,23 % pour Stellantis, -5,6 % pour Mercedes, -5,21 % pour Volkswagen -4,39 % pour BMW, et même Renault, qui résistait mieux que d’autres marques ces dernières semaines, reculait de 2,83 %. Pour les constructeurs asiatiques, c’est également une journée compliquée, avec Toyota, le leader mondial, qui perd 4,41 %, ou -5,45 % pour Honda. Aux Etats-Unis, des constructeurs ont d’ailleurs annoncé des pauses dans leurs usines, des hausses de prix, ainsi que des arrêts de production ou de ventes de certains modèles. Côté aéronautique, Airbus (-7,04 %), Boeing (-8,14 %) et United Airlines sombrent (-6,11 %).

Les banques en souffrance

Les banques et assurances françaises ne sont pas épargnées par cette dégringolade, en particulier la Société générale qui, avec -10,1 %, est le plus fort recul du CAC 40. BNP Paribas (-6,82 %), Crédit agricole (-4,46 %) ou Axa (-5,44 %) baissent fortement aussi, tout comme la Deutsche Bank (-9,77 %) ou UniCredit (-9,58 %). Selon Reuters, les plus grosses banques japonaises ont terminé la semaine avec les pertes les plus importantes depuis la crise financière de 2008. Après les annonces de Trump puis de la Chine, et avant celles de l’UE, le secteur bancaire parie tout simplement sur une récession.

«Si ces tarifs ne sont pas réduits rapidement, ce qui est possible mais qui nous semble difficile, cela devrait pousser les Etats-Unis au bord de la récession dans les prochains trimestres», estime Xavier Chapard, stratégiste chez LBP AM. Cette politique commerciale des Etats-Unis, agressive et protectionniste, risque aussi de «faire remonter l’inflation américaine au-delà de 4 % d’ici la fin de l’année», ajoute-t-il.

Sur le front des métaux, le cours du cuivre à la Bourse de Londres a finalement terminé sa journée dans le vert. Une tonne de ce métal coûtait 9 532 dollars, en hausse de 1,13 % par rapport à la clôture de la veille, après avoir brièvement reculé de 5,1 % à 8 890,50 dollars. D’autres entreprises, comme le leader de l’acier ArcelorMittal et le spécialiste franco-italien des semi-conducteurs STMicroelectronics, subissent également les attaques sur les droits de douane, ces matières et produits étant au sein d’une chaîne de valeur particulièrement mondialisée.

«Il n’y a donc aucun signe de soulagement immédiat»

«Nous nous attendions à des annonces choquantes de Donald Trump, et cela a été pire» qu’escompté, écrit le stratégiste Xavier Chapard. Les nouvelles taxes prévues sur les produits importés aux Etats-Unis vont d’un plancher de 10 % pour tous, à 54 % en cumulé pour ceux en provenance de Chine. Les marchandises de l’Union européenne feront, elles, l’objet d’une taxe à l’importation de 20 %. Certains territoires français d’outre-mer sont même visés par des droits de douane additionnels plus élevés (37 % pour la Réunion et 50 % pour Saint-Pierre-et-Miquelon).

«Donald Trump a déclaré jeudi soir que ‘‘les droits de douane donnent [aux Etats-Unis, ndlr] un grand pouvoir de négociation’’, mais que les autres pays devraient offrir quelque chose de «phénoménal» dans le cadre des négociations pour qu’il cède. Il n’y a donc aucun signe de soulagement immédiat», écrit Jim Reid, économiste de Deutsche Bank. «Par exemple, le président français Emmanuel Macron a déclaré jeudi que les entreprises françaises devraient suspendre leurs investissements aux Etats-Unis», a cité Jim Reid.

La France investit davantage aux Etats-Unis que ce que les Américains injectent en France. En 2023, les investissements directs français outre-Atlantique s’élevaient à 370 milliards de dollars, faisant de la France le troisième investisseur européen et le cinquième investisseur étranger aux Etats-Unis, selon les chiffres du Bureau of Economic Analysis (BEA) américain. Dans le sens inverse, d’après la Banque de France, les Etats-Unis ont atteint un niveau total d’investissements de 142,1 milliards de dollars dans l’Hexagone en 2023, ce qui fait du pays de Donald Trump le premier investisseur étranger en France.

Mise à jour : à 22h45, avec l’ajout des valeurs boursières à la fermeture de Wall Street.